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L’ALTERATION DE LA SEXUALITE

L’ALTERATION DE LA SEXUALITE



L’ALTERATION DE LA SEXUALITE

CHEZ LE DEPENDANT

I. LE MAINTIEN DANS UNE SEXUALITE IRREELLE, DECONNECTEE

A. UNE SEXUALITE CHIMERIQUE

Des rapports sexuels idéalisés

La sexualité n’est pas forcément une chose aisée. En effet, une relation sexuelle peut être source de déception. Un rapport peut être douloureux, ou révéler les limites physiques des partenaires. Il peut être source de toutes sortes de conflits.
La pornographie, elle, vend une sexualité idyllique. Les femmes y sont disponibles. Il n’y a jamais de défaillance sexuelle. Les rapports sexuels sont présentés comme incroyablement longs, et toutes les formes de sexualité, des plus classiques aux plus extrêmes, sont envisageables. La jouissance y est omniprésente. Il n’y a pas non plus d’imperfections physiques. Bref, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes!

Cette sexualité n’existe évidemment pas. Ce n’est qu’une chimère, une publicité commerciale à la gloire des pornocrates.

La pornographie « vend du sexe »: comme toute forme de publicité, elle se doit d’idéaliser les choses.

Cependant, le dépendant aura tendance à se laisser convaincre par le mirage! Il est en effet beaucoup plus facile pour lui de se réfugier dans ce stéréotype de sexualité, que de chercher une satisfaction sexuelle dans le monde réel. Ce que proposent les pornocrates est si tentant ; pourquoi devrait-il s’y refuser ? Frédéric JOIGNOT expliquait que la pornographie constituait « pour nombre de consommateurs amateurs, une autre manière de « vivre » le sexe » (4)

La déception de la première fois

Des garçons…

C’est un fait déplorable, mais que nul ne peut nier: les adolescents et jeunes gens nés à partir de 1990 ont grandi avec la pornographie, et cette dernière a « accompagné » la construction de leur identité sexuelle.

Ma génération, celle de ceux qui ont récemment passé le cap des 30 ans, avait effleuré le phénomène à la fin des années 90. Les générations qui ont suivi ont été frappés de plein fouet.

Quand ces jeunes gens, généralement des garçons, ont commencé à se poser les questions que l’on s’est tous posés sur la sexualité, ils ont fait confiance aux réponses que leur apportait sur un plateau doré les sites porno et le film du samedi soir de Canal .

Les effets d’une consommation régulière de porno sur un esprit adolescent sont désastreux. De nombreux ados n’ont jamais eu de discours pour contrebalancer celui de la pornographie, faute d’expérience et d’avoir abordé le sujet à la maison.

Du coup, certains conceptualisent leur première expérience sexuelle comme une sorte de jeux du cirque de la sexualité, persuadés que tout dans la sexualité ne serait que jouissance sans bornes et performances athlétiques. Avant même d’avoir débuté leur vie sexuelle, ils hissent très haut la barre de leur propre jouissance, à un niveau quasi olympique.

Mais à l’occasion de leur première fois, et de celles qui suivent, les garçons découvrent comme tous ceux avant eux que la sexualité, ce sont aussi des hésitations, les limites physiques du corps, la pudeur et l’inexpérience du partenaire. Les garçons constatent aussi que non, toutes les jeunes filles n’aiment pas la fellation ou la sodomie, ou que l’épilation intégrale du corps féminin n’est pas une norme. Les garçons doivent également faire face à leurs propres doutes vis-à-vis de leur performance: maintenir une érection durant des heures, comme semble le faire les hardeurs, n’est pas à leur portée. Ils se sentent inférieurs, car ils n’ont pas conaissance des trucages que déploit le porno pour leur faire croire à l’infaillibilité des corps.

Et du coup, forcément, ces adolescents sont déçus. Et ils passent à côté de tout ce que la première fois représente de merveilleux: un échange entre deux partenaires, l’abandon de sa confiance dans celle de l’autre, une nouvelle étape vers l’âge adulte… Ils pensent rater leur première fois parce que la prestation n’aurait pas été au niveau du standard pornographique; mais ils la ratent car ils n’arrivent pas à saisir le caractère unique de ce moment.

eunes filles

Or, pour certains adolescents, cette première expérience ratée va leur faire perdre durablement confiance en eux, ne comprenant pas pourquoi les choses ne sont pas passées dans les films. A défaut de point de comparaison, les garçons ne comprennent pas qu’ils ne sont pas moins doués que les autres ados de leur âge, et que c’est ce que montre les films X qui est surréaliste.

Ils peuvent également développer une forme de déception vis-à-vis des jeunes filles de leur âge, « tellement coincées » ou « différentes » si on les compare aux atrices de leurs films favoris. Cela peut avoir deux conséquences:

– soit la recherche de partenaires sexuels convenant à leurs fantasmes pornographiques, recherche que l’on sait par ‘avance vaine (voir plus bas)

– soit un désintérêt pour la sexualité relationnelle au profit de la masturbation, dont la dimenion fantasmagorique est connue et rassurante.

… et des filles

Pour les jeunes filles, généralement beaucoup moins enclines à la dépendance, le vécu est souvent tout autre.

Beaucoup attendent de leur premier partenaire de l’affection, de la tendresse en plus du seul plaisir sexuel.

Or, le porno n’apprend pas aux garçons à être tendre ou affectueux avec les femmes, qui ne sont présentées que comme des objets sexuels. En terme d’image de soi, dur d’avoir l’impression d’avoir été traitée comme un simple morceau de chair lors de son premier rapport sexuel.

TEMOIGNAGE DE BENTHOMAS, DEPENDANT EN COURS DE SEVRAGE, 27 JANVIER 2011

« A 16 ans, première « vraie » copine. Tout se passe bien au début, je l’aime, enfin pense l’aimer. Puis arrive la première relation sexuelle. Je m’attendais à quelque chose de phénoménal. Finalement très déçu [parce] que je n’ai pas éjaculé. Au fur et à mesure que nous nous voyions, elle voulait souvent faire l’amour. Mais moi, tellement déçu par cette première expérience, je préférerais le porno à elle. Comme je n’ai jamais éjaculé avec elle, elle en a déduit qu’elle ne m’excitait pas et m’a donc quitté. »

Source : Témoignage issu du forum du www.pornodependance.com

Une vaine recherche de partenaires sexuels

Dans la très très grande majorité de sa production, la pornographie présente les femmes comme des poupées de chair perpétuellement disponibles, et entièrement soumises au plaisir de l’homme. Les femmes n’ont pas de limites dans leurs pratiques, si ce n’est celles que leur imposent (rarement) les hommes. Le dépendant a intériorisé cette vision de la sexualité. De façon plus ou moins consciente, plus ou moins admise, il croît ou espère que la sexualité se passe de cette façon.

Se posera alors pour lui la douloureuse étape du retour sur Terre! Cette vision de la sexualité est évidemment complètement erronée. La sexualité se construit bien autour du respect et de l’écoute l’un de l’autre. On ne peut aller au-delà du seuil de pratique le plus bas des pratiquants. Le dépendant rêve d’une sexualité hors-norme, ne trouvant plus de satisfaction dans la sexualité conventionnelle.

Aussi, nombre de dépendants entretiennent une forme de déception, de rancoeur vis à vis de la sexualité classique. Ils ont beaucoup de mal, dans la « vraie vie », à trouver les partenaires dont ils rêvent, et encore plus à établir une relation sur le long terme (4). Ils cherchent désespérément la sexualité inventive que leur vend la pornographie. Or, comme le rappelle Gérard Bonnet, « il n’y a pas de sexualité possible sans répétition : depuis la plus haute antiquité, on s’est efforcé d’enseigner aux hommes comment varier les plaisirs, diversifier les positions, multiplier les expériences, et les sexologues comme les magazines spécialisés rivalisent d’inventivité. Mais quoi que l’on fasse, cela aboutit au même résultat. » (2)

B. L’ENTRETIEN DE LA MISERE SEXUELLE ET DE LA FRUSTRATION

La frustration est le moteur de la pornographie

Le consommateur peut également éprouver du désintérêt, ou de la peur, pour les relations sexuelles conventionnelles. En effet, il crève d’envie de faire ce qu’il voit à l’écran, mais sait parfaitement que cela lui est impossible. Il ne connaît pas les partenaires sexuels adéquats (ces derniers existent-ils seulement?); il ne peut physiquement se soumettre à cette sexualité extrême qui l’attire. Ou bien, il y a goûté, mais en est revenu extrêmement déçu.

Dans tous les cas, le dépendant éprouve une véritable misère sexuelle, « cette misère est grande, car les gens ont des tas de représentations sur ce qu’ils pourraient faire et ils crèvent à petit feu parce que ce rêve ne se réalise pas » (2). C’est cette misère qui est bonne pour la pornographie, car elle est la pierre angulaire du marché: les frustrés consomment pour évacuer leur frustration, et sont frustrés parce qu’ils consomment.

Frédéric JOIGNOT faisait dans son livre un parallèle entre la vision des films pornographiques et la visite aux prostituées. Toutes deux sont en effet de vaines tentatives de combler une misère sexuelle (4) Cependant, la grande différence est que la consommation de pornographie n’est pas considérée par son usager, comme une forme de tromperie. Elle est également socialement beaucoup mieux admise. La prostitution est, de surcroît, illégale !
C’est pour cela que la pornographie s’est aujourd’hui imposée comme le nouveau palliatif aux sexualités défaillantes. Pourtant, en entretenant le fantasme d’une sexualité irréelle, elle est la cause du malheur de ses utilisateurs.

La pornographie empêche la formulation de fantasmes autonomes

Un fantasme est l’expression d’une pensée sexuelle dans un contexte précis. Elle découle principalement du vécu du fantasmeur, éventuellement de la connaissance du vécu du fantasmé, ou d’un contexte particulier (lieu de travail, de vacances, etc.)

La pornographie impose des fantasmes. La pornographie, en effet, ne laisse nullement place à l’imagination : elle impose des vues sexuelles, des positions. Elle standardise les fantasmes.
Le dépendant est tellement habitué à ce que la pornographie lui amène sur un plateau son univers fantasmatique, qu’il peut se révéler incapable d’en développer un seul.

D’ailleurs, chez nombre de dépendants, la pornographie est partie prenante du fantasme. Les fantasmes les plus courants aujourd’hui sont directement nés de la pornographie (relation à plusieurs, soumettre sa compagne à un ou plusieurs inconnus, fantasmes de lingerie, de relations sexuelles filmées, de photos érotiques…)
A partir du moment où le dépendant n’est plus capable de formuler seul un fantasme, il ne peut se le réapproprier. Il ne fait que projetter sur le corps de l’autre ce qu’il a vu à l’écran. La richesse de ses relations sexuelles peut en pâtir.

L’illusoire et désastreuse théorie de la catharsis

Jusque dans les années 1990, certains « spécialistes » ont affirmé le caractère palliatif de la pornographie, face à certains troubles sexuels.

La pornographie aurait eu le pouvoir de combler la frustration sexuelle. Elle aurait même été capable d’aider les criminels sexuels à contenir leurs pulsions. Cette théorie, dite de la « catharsis », a amené des générations de sexologues à encourager la pornographie, pour guérir aussi bien les programmes sexuels des couples, que les perversions sexuelles des criminels.

Aujourd’hui, l’absurdité de cette théorie apparaît évidente. La pornographie ne soigne pas la frustration, mais au contraire, la maintient! Le remède proposé était bien pire que le mal….
Pour preuve, dans la vie de la plupart des criminels sexuels, la pornographie joue un rôle d’excitant. Beaucoup annoncent avoir passé à l’acte en vue de réaliser leurs fantasmes pornographiques (voir à ce titre, l’article « Pornographie et criminalité »)

L’habituation à une vision extrême et violente de la sexualité

La pornographie présente une sexualité « de l’extrême », où les rapports conventionnels sont dénigrés au profit d’actes plus poussés, plus techniques, mais aussi plus violents.
Le dépendant trouve son excitation dans cette monstration de technicité et de v******e. Petit à petit, par un phénomène d’habituation, il ne trouve plus d’excitation dans des rapports conventionnels. Seule la vision de rapports extrêmes arrive encore à l’exciter. Au fur et à mesure, le dépendant augmente les doses de « hard », afin de maintenir son excitation.

TEMOIGNAGE

Mathias, 32 ans, marié, deux enfants, a vécu l’engrenage du sexe par cyberprocuration : « Je passais des heures à me caresser devant l’écran. Il m’en fallait toujours plus. Toujours plus cru, toujours plus hard. Mais au bout d’un certain temps, je finissais par m’habituer. »
Source : Le concensus pornographique, par Xavier Deleu

TEMOIGNAGE

Claude passe ses nuits entières devant son ordinateur, et désinvestit toute vie familiale, il ne partage plus rien avec sa femme ni avec leurs deux enfants. Dès qu’il rentre du travail, il se jette sur son PC pour ne tout juste décrocher qu’au moment des repas. Mais plus encore, Claude se focalise sur des sites pornos qui dégoûtent sa femme.
(…) Evidemment, les heures de connexion ont augmenté, mais c’est surtout parce que sa femme l’a récemment surpris sur un site d’images de viol. Claude reconnaît que cela lui pose maintenant également problème. Son mode de consultation des sites a effectivement changé. Comme une drogue, il lui en faut de plus en plus pour trouver le plaisir et l’excitation – une sorte d’escalade des fantasmes dans des sites de plus en plus « glauques ».
Source : Accros à l’écran ? Et pourquoi pas ! Du Tamagotchi au Cybersexe, Entretiens avec Jean-Claude Matysiak et Odile de Sauverzac, Editions PASCAL, Enquête, mai 2006

La situation peut se révéler dramatique lorsque le dépendant essaie d’imprimer sur sa compagne les fantasmes violents qu’il a intériorisés. Ces dernières ne suivent pas forcément leurs compagnons dans leur univers fantasmatique. Certaines, au lieu de s’opposer, se résignent, ce qui peut entraîner les séquelles psychologiques qu’on imagine.

Richard Poulin, à l’occasion des travaux de son livre « La v******e pornographique », avait posé cette simple question à des femmes interviewées: « avez-vous déjà été indisposées par quelqu’un qui voulait vous amener à faire quelque chose qu’il avait vue dans des livres, des images ou des films pornographiques? Si oui, pourriez-vous nous parler brièvement de l’expérience qui vous a le plus choquée? »

Les réponses qu’il a récoltées sont édifiantes:

« Réponse D : Il s’agissait de gifles et des coups. Le plus troublant, c’est qu’il pensait que cela m’excitait.
Réponse G : Mon mari aime beaucoup les films pornos. Ses idées de m’introduire des objets dans mon vagin m’avaient toujours choquée. Il avait l’habitude de m’obliger à le faire, ou de mettre lui-même tout ce qu’il voulait dans mon vagin.
Réponse H : Il m’avait forcée à le sucer. Il voulait aussi verser du champagne sur mon vagin.
Réponse I : Le coït anal. Quand je lui ai dit « non », il l’a fait quand même. Cela m’a fait terriblement mal. »

Source : La v******e pornographique, par Richard Poulin. Troisième partie : Les effets de la consommation. Chapitre VI : La v******e sexuelle. Editions Cabédita, Collections Archives Vivantes.

C. L’ENTRETIEN D’UNE PRATIQUE MASTURBATOIRE EXCESSIVE

La masturbation (ou onanisme) est une activité inséparable de la consommation de pornographie. En effet, toutes deux sont des plaisirs quasi exclusivement solitaires.

La masturbation est à la fois la cause et la conséquence de la pornographie; le consommateur de pornographie se masturbe parce qu’il voit du porno ; il voit du porno pour pouvoir s’exciter et se masturber.

Mais pour le dépendant, la pratique de la masturbation prend un tour compulsif, obsessionnel. Le dépendant a recours à la masturbation par besoin ou par habitude, beaucoup plus que par plaisir. Certains dépendants continuent de se masturber de façon compulsive, quand bien même ils ont accès à un partenaire sexuel régulier.

Le dépendant perd alors petit à petit son intérêt pour la sexualité « relationnelle ». Ce qui excite le dépendant, ce ne sont plus tant les scènes pornographiques qu’il fait défiler dans sa tête : mais bien le fait de les faire défiler. Le sexe devient pour le dépendant une « affaire cérébrale, une fantasmatisation pratique (…) déconnectée de la relation à autrui » (2). Cette dernière est en effet beaucoup plus hasardeuse, et peut se révéler plus décevante, qu’une séance de masturbation qu’on a l’impression de maîtriser. Les dépendants ont abandoné l’aspect relationnel du sexe, au profit d’une vision uniquement fantasmatique. Ils ne ressentent plus autant de désir et de plaisir à faire l’amour avec un partenaire.

TEMOIGNAGE D’ALDORINO, 21 ANS

Voila j’ai 21 ans et jusqu’à tout récemment je n’aurais jamais pensé en arriver là, c’est-a-dire à un stade où j’ai un problème de dépendance sexuelle (…) j’ai commencé à me masturber assez tardivement dans ma vie (vers 15 ans) et j’ai véritablement commencé à regarder des images pornos à l’age de 16 ans. Mais ça n’a jamais été abusé (…)

En 2008 j’ai achetté un pc portable (pour mes études) et j’ai alors commencé à visiter les sites pornos beaucoup plus souvent et à mon aise…au départ je n’y voyais pas de problème puisque c’était pas abusé mais quelques mois plus tard j’ai commencé à me masturber très souvent tout en mattant les sites pornos (photos/vidéos). Je ne passais pas énormément de temps à matter, c’était juste pour me masturber mais c’était très fréquent. Il m’arrivait de me masturber 5-6 jours consécutifs et cela 1 a 3 fois par jour. J’avais alors constaté que ce cercle nuisait à mes études et il arrivait même que je me gardes et reserves des jours uniquement pour ça ! C’était comme si je ressentais le désir de me masturber sans nécessairement avoir une réelle envie sexuelle (…)

Parfois je pense à la porno lors de situations totalement non-appropriées et c’est là que je peux constater que j’ai effectivement un problème. Je peux me lever un matin et une fois sous la douche je pense à la masturbation devant les images que je compte faire en après-midi ou en soirée… (…) c’est pathétique.

Source : témoignage d’Aldorino, 17 mars 2010, sur le forum du site www.pornodependance.com

La masturbation finit par devenir pour le dépendant son unique forme de sexualité. Mais cette dernière ne saurait satisfaire pleinement un individu, dans la mesure où la relation à l’autre est ici inexistante. La pornographie entretient ainsi la frustration: le dépendant se masturbe parce qu’il ne peut pas faire autrement ; mais sait-il encore faire autrement ?
Le dépendant s’entraîne lui-même dans un cercle vicieux de misère sexuelle, dont il lui sera difficile de sortir. Il se masturbe pour oublier sa misère sexuelle et sombre dans la misère sexuelle parce qu’il se masturbe.

III. L’ALTERATION DE LA SEXUALITE DU DEPENDANT: EFFETS A COURT ET LONG TERME

La pornographie, en théorie, stimule la libido, par l’hypertrophisation de la pulsion sexuelle.
A court terme, elle entretient le consommateur dans un état d’excitation sexuelle. Ce dernier a alors tendance à projeter une fantasmagorie sexuelle sur le monde qui l’entoure. Il est sexuellement et continuellement surexcité.
Mais à long terme, l’usage continu de pornographie entraîne une lassitude vis-à-vis de la sexualité. Une sorte de ras-le-bol, de sentiment de « déjà vu » saisit le consommateur. A long terme, le consommateur perd son excitation.
Il convient de préciser que cette observation ne s’applique pas aux pervers sexuels. Pour eux, la pornographie jouera surtout un rôle dans l’entretien de leurs perversions; la phase d’altération sera souvent remplacée par une phase de passage à l’acte. (voir à ce titre la page « Pornographie et criminalité »)

A. A COURT TERME: MAINTIEN D’UNE EXCITATION ET D’UNE AGRESSIVITE PASSAGERE

Une excitation sexuelle entretenue

L’accoutumance à l’érotisme et la pornographie a tendance à hypertrophier la pulsion sexuelle, qui devient alors susceptible d’être constamment éveillée. Le drogué à la pornographie, projette ses fantasmes sur tout ce qu’il rencontre. La consommation de pornographie est donc logiquement suivie d’une phase de formulation de fantasmes.

Note : les observations cliniques qui suivent sont issues des travaux de la Commission U.S. sur l’obscénité et la pornographie (1971) (6)
Nous ne partageons pas les résultats de cette Commission, dont les conclusions, datées de 40 ans, avaient abouti à une très faible nocivité de la pornographie. Mais en 40 ans, les choses ont changé! La pornographie est beaucoup plus ancrée dans notre société, au point tel que des générations entières ont vu leur construction de la sexualité influencée par la pornographie. Mais surtout, la pornographie est aujourd’hui beaucoup plus hard et violente: ce qu’à l’époque, on appellait « pornographie », serait massivement considéré aujourd’hui comme du « simple érotisme ».

Je reproduis ici toutefois les observations cliniques, indépendamment de leurs interprétations.

Les membres de la Commission ont observé que, suite à la projection de scènes érotiques, nombre de cobayes cherchent à obtenir un apaisement sexuel (sous la forme d’un rapport sexuel ou d’une masturbation, selon que le cobaye ait ou non possibilité d’obtenir un partenaire sexuel). Ce phénomène est particulièrement marqué chez les hommes et les femmes de moins de 25 ans.

Cette « frénésie sexuelle » s’étale dans les 24 heures suivant l’exposition, pour finalement redescendre dans les 48 heures.

La pornographie joue donc indéniablement sur notre état sexuel, en suscitant une activité sexuelle plus accrue. En cela, la pornographie joue donc bien le rôle d’un excitant à court terme.

Le maintien dans un état d’agitation et d’agressivité

« Mon mari est devenu agressif et colérique dans la vie quotidienne (…) Une sorte de seconde personnalité prend le dessus… »

Témoignage sur le site orroz.freesurf.fr

Les membres de la Commission ont également questionné les cobayes, sur leurs évolutions comportementales suite à l’exposition à la pornographie. Après une semaine de vision soutenue de films érotiques, les étudiants et étudiantes ont déclaré des évolutions dans leurs ressentis. Ils se sentent généralement plus « agités intérieurement », et « irrités ».

Les garçons se déclarent plus « grégaires », et « spontanés » ; ils avancent avoir de la « difficulté à se concentrer », se sentent « mal à l’aise », « actifs », « ayant des difficultés pour dormir ». Les filles se décrivent comme plus « émotives », « sauvages », « déshinibées », « en forme », et « étourdies ».

Il apparaît donc que l’état d’excitation causé par la pornographie, ne se limite pas au domaine sexuel, mais déborde sur l’ensemble de la sphère comportementale. A court terme, une consommation massive de pornographie maintient dans un état d’agitation, de nervosité qu’on ne lui reconnait pas. Il devient agressif, irritable, avec son entourage.

Nombre de dépendants en viennent à développer une sorte de schizophrénie; il y a « l’homme de tous les jours », et puis « l’homme en manque », beaucoup plus agressif.

B. A LONG TERME: UNE ALTERATION DE LA LIBIDO

Une perte d’intérêt pour la sexualité conventionnelle…

De nombreux témoignages démontrent que, à long terme, des consommateurs assidus de pornographie, perdent peu à peu leur intérêt pour les rapports sexuels.

Ainsi, une jeune fille, à l’occasion de la rédaction de « La Perversion ordinaire », se plaignait à l’auteur Jean-Pierre LEBRUN que son « mec est tellement gavé de films porno qu’il met maintenant des heures à jouir. Plus rien ne le bouleverse ! » (1)

A force de visionner des images non stop de couples en plein ébat sexuel, nombre de consommateurs surexposés viennent à ressentir une certaine lassitude. Le sexe a perdu sa dimension relationnelle, son sens affectif, pour ne devenir qu’une succession de poses techniques sans saveur.
Pour d’autres, qui se noient dans la pornographie, il finit par devenir évident que le monde réel ne peut abreuver l’univers fantasmatique que leur promet la pornographie. Le sexe « réel » perd alors son intérêt, au profit de la sexualité virtuelle pornographique.

La seule étude expérimentale sur le sujet à ce jour, a révélé le fait qu’une exposition continue ou répétée aux stimuli érotiques pendant plus de 15 jours avait pour résultat une saturation (diminution marquée) de l’excitation sexuelle et de l’intérêt porté à ces matériaux. Dans cette expérience, l’introduction de stimuli sexuels originaux régénerait partiellement l’intérêt saturé; il se produisait également un renouveau d’intérêt après deux mois de non-exposition. (1)

…Y compris chez ceux qui travaillent au plus près de la pornographie

Le plus édifiant reste sans doute les témoignages de gens travaillant au plus près de la pornographie. Qu’ils travaillent pour le marché pornographique, ou soient juste des observateurs habitués, tous convergent dans le même sens.

Anne Steiger a été durant cinq ans la « madame sexe » de différents magazines pour adolescents. Elle a écrit sur le sexe a peu près tout ce qu’il était possible d’écrire, le plus souvent sur un ton parodique, au détriment de toute crédibilité journalistique, et raconte son expérience dans son livre « La vie sexuelle des magazines : comment la presse masculine manipule notre libido et celles ados » (Editions Michalon, 2006). (3)

A l’issue de cinq années d’intenses rédactions sexuelles, elle, qui se décrivait auparavant comme « plutôt à l’aise avec sa sexualité », en est venue, dans un chapitre judicieusement intitulé « Mes écrits m’ont tuée », au constat suivant : « impossible dorénavant de me laisser aller avec mon partenaire. La douleur. Le médecin vous dit que c’est une phobie de la pénétration. Par anticipation à la douleur, vous vous crispez, ce qui fait augmenter la douleur » (…) « Plusieurs mois se sont écoulés, je me suis décoincée. La sexualité a enfin retrouvé sa dimension magique ».

La responsable du stand de la Délégation Générale de la Santé, dans les différentes « foires au sexe », comme par exemple le salon de l’érotisme à Paris, exprime sa fatigue « à force de voir » défiler la pornographie devant ses yeux. Elle dit d’elle-même qu’elle n’a plus de « libido ». (2)

Milukman (c’est évidemment un pseudonyme) est responsable de quelques sites pornographiques sur Internet.
Dans son ouvrage « X Business, Les dessous du sexe sur Internet » (Editions First, 2009), il s’exprime ainsi : « Une question revient souvent : travailler dans le X, que ce soit en tant qu’éditeur, producteur ou webmaster, n’engendre-t-il pas une certaine lassitude du sexe ? on ne peut nier que le fait de travailler dans ce business peut parfois engendrer une frustration sexuelle et perturber certains esprits. Il est évident qu’une personne instable, ayant une propension à la déviance sexuelle, qui se lance dans le X business par amour du porno, obsédée par le cul et qui, dès le départ, a une vie sexuelle misérable, n’évoluera clairement pas vers la sérénité la plus absolue en travaillant dans ce secteur. » (5)

C. DES CAS D’IMPUISSANCE

Les travaux de la sexologue Andrée Matteau

La sexologue Andrée Matteau est une des pionnières de la recherche sur les effets physiologiques de la pornographie. Richard Poulin, dans son livre La v******e pornographie, retrace une expérience qu’elle a menée :
« Elle avait comme patient un homme souffrant d’impuissance secondaire, c’est-à-dire d’une incapacité d’être en érection suffisante pour avoir une relation sexuelle complète. Elle lui demande de bien vouloir se prémunir d’un pléthysmographe, un appareil qui enregistre les variations et la circonférence du pénis, ce qui permet d’évaluer le niveau d’excitation sexuelle.
Le patient est invité à regarder une série de diapositives représentant l’action d’une effeuilleuse.
Lentement, l’aiguille de l’appareil de rétroaction du pléthysmographe enregistre les variations de la tumescence pénienne et montre les degrés d’excitation sexuelle. Tout va bien, le patient peut facilement être érection et peut la maintenir.
Voilà donc un patient qui souffre d’impuissance secondaire et qui ne peut pas faire l’amour. Par contre, il n’a aucun problème d’impuissance lorsqu’il est mis en présence de matériel pornographique. »

Le problème de ce patient n’est donc pas strictement physique, puisqu’il arrive à maintenir une érection. Son problème est que seule la pornographie l’excite suffisament pour maintenir cette érection.

Ce patient a donc déplacé son excitation de la vision du corps de la femme, à la montrance du corps de la femme. Sans excitation pornographique préalable, il est complètement incapable d’avoir une relation sexuelle continue: « Malgré un traitement sexologique complet, ce patient a continué à souffrir d’impuissance secondaire. Bref pour lui, le rapport sexuel fantasmagorique est resté plus satisfaisant que le rapport sexuel réel. » nous explique Richard Poulin.

Des cas d’excitation insuffisante, sans recours à un stimuli d’origine pornographique

Une autre forme d’impuissance, est la nécessité pour un certain nombre d’hommes, pendant les rapports sexuels, d’avoir recours à un imaginaire pornographique pour pouvoir maintenir une érection suffisante.
Richard Poulin rappellait à ce titre le cas de cet homme, incapable d’être suffisamment excité par sa partenaire si celle-ci ne revetissait pas les sous-vêtements érotiques adéquats : ce dernier avait découvert la pornographie vers l’âge de 7-8 ans, par le matériel pornographie de son père.

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