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RENDEZ VOUS CHAUD

RENDEZ VOUS CHAUD



On s’était donné rendez-vous devant la Galerie Saint-Hubert. Je ne savais pas grand chose de lui sinon qu’il était plus âgé. Il signait ses mails toujours A. Je ne savais même pas son prénom. J’aimais seulement sa voix au téléphone, son vouvoiement sirupeux qui me promettait des tortures dont je ne pouvais pas encore saisir l’intensité tout en maniant le verbe comme s’il s’adressait à une reine. J’avais rapidement accepté de le rencontrer.

On s’était installé à la terrasse d’un café et il avait commandé des gin tonic. Avec le recul, c’était ce qui correspondait le mieux à la lourdeur du temps au bord de l’orage. Il me parlait du plaisir, avançant peu à peu ses pions dans mon esprit comme sur mon corps (j’avais rapidement sentie sa main se poser sur ma cuisse nue). Je l’écoutais avec une admiration qui me semble aujourd’hui injustifiée.

Je n’aurai bientôt plus aucune prise sur l’attraction irrésistible du bruit des glaçons tombant dans un verre. Alors j’écouterai, avec la cadence d’un flash info à la radio, le bruit du bouchon que l’on défait, suivi de celui du liquide qui recouvre les glaçons puis les fait flotter. Je serai fascinée par ma propre capacité à ne plus penser, à se laisser à lui, à ne rien ressentir. Au fil de nos rencontres, il fera mine de ne pas voir mon visage aux muscles à demi-défait ; il aimera trop la facilité avec laquelle j’existerai vers lui et me ferai à ses jeux.

Mais, cher lecteur, gardez en tête que je ne savais rien de tout cela alors. Je me trouvais avec cet homme faisant preuve tout à la fois la délicatesse d’un père et d’un amant. On ne parlait pas seulement de petites morts. Je lui parlais de mes études. Il me parlait de sa jeunesse. On partageait nos impressions de lecture sur Gary. J’avais 18 ans et je peux vous assurer que tout cela avait le goût du bonheur. Il me disait que j’étais belle, qu’il aimerait m’apprendre l’amour au sens d’une chose qui se fait.

Il me demanda jusqu’où j’étais prête à aller, si j’avais réfléchi aux propositions qu’il m’a faites par téléphone. J’étais timide. Certains mots n’étaient encore jamais sorti de ma bouche. Et une chose n’y était jamais rentré. J’essayais de ne pas montrer l’ampleur de ma naïveté. Il se rendait compte de mon inexpérience mais ne disait rien à ce propos. Quand le vent se leva et quelques gouttes commencèrent à tomber, il me toucha simplement la hanche et me dit qu’il allait payer l’addition. Je dis : D’accord, merci. Je baissai les yeux. Je saisis mon sac qui était avachi sur la dalle de béton. Je me levai. Je lissai ma robe. Je regardais les alentours en l’attendant. Je me demandais pourquoi je n’étais jamais encore venu sur cette petite place pourtant à quelques minutes à pied de mon appartement. J’avais envie d’inviter B. chez moi. J’avais envie de connaître autre chose que les mains inexpérimentées de quelques garçons rencontrés à la fac.

Il revint et me dit : Tu as décidé ce que tu voulais faire maintenant ?. Je le regardais. Je souriais. Je restais silencieuse. Il m’attira et me pressa contre lui afin que je sente son sexe contre mon ventre. On peut aller chez toi ou je peux repartir comme je suis venu. Il me lâcha, m’embrassa sur le front et me dit : Tu es libre. Je l’invita maladroitement chez moi. Il caressa mon cou et répondit : Allons-y alors. On échangea un certain nombre de banalités puis on entra dans la petite arrière cour pavée où se trouvait mon studio. La porte de l’appartement se referma derrière nous en claquant. On était enfin chez moi. Aucune minute ne s’écoula avant qu’il me bouffe les seins. Il les sortit avec savoir-faire de ma robe en tissu bleu. J’étais troublée de ce moment long et doux que jamais personne ne m’avait jamais accordé. J’étais troublée encore davantage par mon ingratitude. J’avais envie qu’il continue tout en sentant ses doigts visiter mes cavités. J’avais peut-être trop abusé de gin tonic. J’avais l’impression qu’un homme se suffirait pas à me combler.

Ensuite, je me trouvais allongée sur le carrelage, ma robe n’était plus qu’une pièce de tissu descendue au-dessous des seins et remontée au-dessus du pubis rendue lisse par l’esthéticienne et glissante par le désir et la bave. Il me dit de ne pas bouger et prend un foulard. Il m’ordonna de me mettre sur le ventre. Il colla sa main entre mes lèvres pour faciliter mon destin. Il m’attacha les pieds puis vint sur moi. Il était assis sur mes cuisses près de la naissance de mes fesses. Il les écarta savamment. Je l’entendis cracher, je sentis ses doigts étaler la bave. Il m’encula avec une facilité déconcertante en disant : Branle-toi, ma belle. Je n’osais pas. Je ne m’étais encore jamais caressée devant un homme. C’était comme s’il me fallait du temps pour accepter de laisser partir certaines virginités. Il me faisait lécher ses doigts et me caressait. Je sentais mon clitoris se contracter de plaisir pendant une demi-seconde, cela se répéta un nombre de fois que je ne compte pas. J’avais jamais eu l’impression d’avoir été autant mon corps. Les frottements de son torse dans mon dos achevaient de me faire perdre le sens de la réalité. Il y avait ses doigts, son sexe et moi. Moi diluée dans mes sensations, moi qui décidait de me cambrer légèrement pour signifier que j’en voulait encore. Je sentais son souffle s’abattre sur ma nuque comme une bête. J’aimais démesurément la sensation contradictoire d’être abandonnée au plaisir de cet homme dont la vigueur aurait pu facilement me rendre vulnérable mais qui se contentait de me sodomiser avec douceur en étant l’esclave du plaisir

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