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Kiss me stupid

Kiss me stupid



Je ne voudrais pas fournir la recette à tout le monde. Cependant je vous
invite à revoir cette célèbre comédie de Billy Wilder intitulée « Kiss me
stupid »où l’infidélité tant du mari que de son épouse renforce le couple
au bout du compte. Je n’ai jamais su en la période évoquée si mon mari
lui-même s’était rendu coupable d’une pareille faute. Pour ma gouverne
et ma défense je dirais qu’à l’époque mon couple battait de l’aile
notamment à cause que je soupçonnais mon homme d’avoir une liaison.
Autant avais-je fermé les yeux sur les aventures d’un soir ou lorsqu’il
missionnait autant je percevais qu’une femme avait pris le contrôle de
son esprit.

Je conçois à présent que ma jalousie était davantage fondé sur l’amour
propre plutôt que sur la tendresse. L’amour depuis longtemps avait
déserté notre relation. Nous l’avions remplacé par le sexe et le rapport
de force. Nous nous investissions trop en notre métier. Il n’est pas
plus déshumanisant que le boulot de VRP. On vend de tout jusqu’à son
âme. Je ne pensais pas aller jusqu’à une certaine limite. Je fus ce
jour-là furieuse de cette mission de quinze jours dans le Sud. Il était
vraisemblable que tout le monde s’était désisté et qu’on s’était rabattu
sur moi, pauvre cloche. Je n’avais aucun moyen de recours en ce temps.
J’étais mal vu par ma hiérarchie.

Mon mari goguenard me dit que c’était une occasion de me refaire. Il
fallait relever le défi et leur faire rendre gorge. Nous usions souvent
entre nous de métaphores belliqueuses et de compétition. Je voyais
surtout que le zozo allait mettre à contribution mon absence pour
s’amuser. Je semblais perdre de tous côtés. Je traînais ce jour-là des
pieds à la gare de Lyon. Dans la glace des toilettes je vis une femme
aux traits usés comme effacés. Une voix à l’intérieur me susurrait : « Ma
vieille t’as plus vingt ans ! » Tout se liguait contre moi. Je décidais
du coup de revenir plus tard devant cette glace pour appliquer mon
maquillage.

A mi-chemin aux environs de Châlons j’étais une autre femme, plus
pimpante. Le type en face de moi me dévisageait enfin. Je croisais haut
mes cuisses qu’il lorgnat. A Lyon le vieux en vis-à vis était descendu
nous laissant libre cours. Mon type était un commercial. Notre
conversation tournait business et cependant il me draguait. Il
descendait tout comme moi à Aix. Il était vraisemblable que j’étais
disposée à me divertir. En un mot il me proposait de venir me chercher à
l’hôtel pour un bon restaurant. Il connaissait la région comme sa poche.
Un coup de fil idiot du mari acheva de m’enlever mon dernier scrupule.

Je ne mégotais pas sur l’attirail séduction. J’avais à tout hasard
apporté une mini jupe. Ce n’était guère raisonnable. Etait-il concevable
qu’une femme de quarante ans arborât encore ce genre de truc nantie en
plus d’un léger embonpoint qui la pouvait rendre ridicule. Pour masquer
l’aspect inepte de la chose je crus devoir rajouter du fard et du
maquillage comme on ajoute du sel pour ratt****r un plat. Le type à la
réception qui ne m’avait reconnu sursauta. Je jetais un œil dans le
miroir. J’y vis en effet une créature qu’on eût prit aisément pour une
pute requis par un client d’hôtel. De toute façon il était trop tard
pour changer.

L’ami commercial ne put réprimer un sifflement et d’allumer son œil
égrillard. Point de romantisme. Sa vulgarité pouvait s’épanouir. J’eus
vite la main remontant sur la cuisse. J’étais tout à la fois
décontenancée et en colère. Tout cela était la faute du mari. Cependant
qu’y pouvais-je ? Je crus ne pas refuser à ce type. Peu loin il se
rangea pour m’embrasser. Sa main s’activait déjà dans la culotte. Comme
pour me débarrasser et hâter je lui concédais une bonne pipe que je
savais faire. Grand seigneur il m’en remercia par la suite. Le vin puis
la coupe de champagne achevèrent de me rendre toute sentimentale.
Il me sauta sans vergogne sur le lit. Mon look de pute l’avait
manifestement émoustillé. Il se dépensât sans compter. Je crus un moment
que j’allais dire pouce. Il avait sans cesse pilonné mes orifices. Enfin
sans prévenir il s’écroula dans le drap abruti de fatigue. Je n’étais
quitte moi-même qu’à me reposer et me remettre de ces émotions. Le
lendemain matin apaisé il ne réclamât qu’une pipe en guise d’au revoir.
La vulgarité l’avait abandonné. Il se comportât en gentleman et
n’insista pas pour avoir mon numéro. Ce détail me chagrina plus que de
raison. Etais-je à ce point négligeable ? Je m’en vengeais plus tard en
discutant féroce au cours du premier rendez-vous.

Je fis un carton. Je sortis le clairon pour aller l’annoncer au patron.
Je le vis surpris plus que mécontent que je pus mater un client si
coriace et retors. Cette semaine-là j’eus le feu. Pris d’une ivresse
vengeresse, je mettais à tout coup le pied dans le plat et pratiquais à
tout crin l’offensive au risque de me planter. Pour la plupart cela
marchait. Au besoin je recourus une fois à la fameuse minijupe. Pour un
client manifestement porc. Il ne me cachât pas son goût pour les jeunes
filles et notamment sa secrétaire qui ce jour-là l’accompagnait. Un
moment par défi je lui jetais en catimini : « Je vous crois un Don Juan
de pacotille. »

Deux heures après il m’appelait pour m’inviter à dîner. Il éclata de
rire quand il me vite accoutrée en pute comme la première fois. Bon sire
il déclara que je l’avais convaincu. Je n’en dus pas moins dispenser
l’une de mes meilleures pipes. Ceci acheva de le subjuguer. En fait le
bougre était fort sympathique. Pris d’alcool et de tristesse j’en vins
aux confidences. Notamment sur la goujaterie de mon mari. Il m’asséna
que c’était banal. Que j’étais sotte à me faire du mauvais sang. Il me
dit goguenard nous allons lui donner une leçon. Il m’emmena à l’hôtel et
me montrât qu’en vieux Don Juan il avait le pétard requis et toute
l’endurance.

Ce fut la seconde semaine que j’outrepassais la limite. Ce dont j’ai le
plus honte. En effet la nuit pour m’endormir j’écumais des sites et
jouais à allumer plein de types et de débiles. Il advint qu’à l’un plus
sympa et rigolo, je consentis un rendez-vous le midi près d ‘un centre
commercial. Il était convenu que ce fut court et furtif. Juste une pipe.
En fait la pipe dura. C’était un jeune et beau gosse. Je ne pus refuser
qu’il me sautât plus loin sur sa banquette. Il obtint même de m’enculer.
Plus tard je dus admettre que j’avais du lui paraître une parfaite
salope. Point en reste je donnais le même jour deux semblables rendez-vous.

Sur les six autres jours j’ai bien du sucer quelques trente types.
J’étais pris en un engrenage et comme en un vertige. Autant je devais
faire rentrer du chiffre d’affaires d’un côté autant je devais de
l’autre me taper nombre de mecs. Certains obtenaient davantage. Avec ma
minijupe dans la voiture je ressemblais à une prostituée. Je
m’identifiais à ces pauvres créatures. Un jour par jeu je demandais à un
type qu’il me rémunère de tant. Il le prit bien. Il me dit que sur
certains sites sévissaient des putes tarifées en mon genre. Ce fut comme
le coup final de ma déchéance. Le dernier jour dupe d’un pseudo je vins
à tomber sur mon commercial du TGV

Il le prit bien. Nous en vînmes à rire. Il m’invita de nouveau au resto.
Me sauta de même. Cette fois il fut parfait gentleman. Autant que moi il
avait fait de bonnes affaires. Mon mari entre temps avait renoué empli
de gentillesse. Cela semblait du rabibochage. Je sus ultérieurement
qu’il avait rompu avec sa maîtresse et qu’il en était triste presque
désemparée. De mon côté j’étais peu fière car gagnée par la honte. Dans
le TGV un jeune homme me draguât. Je déclinais. J’avais envie de tout
oublier et de me laver de la souillure des dernières semaines. J’avais
décidé de tout recommencer avec mon mari. Je trouvais pour le coup le
sexe vilain et inconcevable le coup de folie dont j’avais été la dupe.
Quoiqu’il en soit j’obtins outre des félicitations une promo de mon
patron. La vie était belle.

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