Culotte aux talons. Sa vulve est exposée à l’amant d’un soir. Humide, son sexe, avide de tendresse buccales, en attendant l’offrande phallique. Elle l’attend, patiente et ardente en même temps. Le désir est âpre et sa saisit jusqu’au creux des entrailles.
Les semailles d’amour. Elle les attendues tout le jour, en pensant à lui sans répit. Lui, l’amoureux au premier contact. Ils se sont croisés dans un train, assis face à face. Tout de suite, l’embrasement sensuel, sans qu’ils puissent expliquer pourquoi. Peut-être une question de fragrances qu’ils ne perçoivent pas consciemment.
Cette nuit enfin, l’heure de la rencontre intime, du rapprochement des chairs. Le matin, elle a choisi des sous-vêtements aussi rouges que la brûlure qu’elle ressent sur sa peau, dans la perspective de l’étreinte. La promesse de la gare est devenue réalité. Pourtant, avant, elle n’aimait pas ces vêtements qu’elle jugeait vulgaires et que sa sœur lui avait donnés. Ils étaient relégués au fin fond du placard. Elle les a exhumés afin de les porter pour la première fois. Dès qu’elle avait enfilé la culotte, il lui a semblé que ce cache-sexe de soie et de dentelles appartenait depuis toujours à son propre corps. Le soutien-gorge, pareil.
C’était pour mieux les retirer, devant ses yeux, bien-sûr. Lui offrir sa nudité progressive. Les hommes sont faciles à séduire. Cette idée la fait rire. Il se demande pourquoi cette étrange hilarité soudaine. Mais elle, par contre, ne révèle pas si facilement les mystères de ses pensées féminines.
Cependant, l’action ne se déroule pas comme elle le prévoyait.
L’amant se met à genoux. Il révère sa compagne d’un soir. C’est sa manière d’aimer ; il en connait bien d’autre, mais pour elle, il se fait chevalier galant. Il bécote les pieds, en même temps que le tissu carmin imprégné d’odeurs femelles. Il prend son temps. Elle le regarde avec étonnement. Elle attendait qu’il la prenne comme un fauve, ou plutôt comme un hussard à l’assaut, sabre au clair.
Ce qu’elle ignore encore, c’est que son corps de femme n’est pas parfait, mais que par contre, ses pieds le sont. On croit souvent ces organes bêtement utilitaires alors que loin d’être de simples outils pour la marche, ils captent le désir mieux que les seins et le sexe et tout autre partie de l’anatomie d’une belle. Emballés dans des sandales, ils portent en eux des concentrés de ses parfums de sueur et de sensualité. Libérés, ils en diffusent la quintessence. Ils sont déclencheurs de la concupiscence.
Il pleure. Il est nu et verse ses larmes sur les pieds couronnés de dentelles. Il sanglote parce que la vie est compliquée et que les relations entre un homme est une femme le sont plus encore. Parce qu’on lui a toujours appris à masquer ses émotions et que le bouleversement que la rencontre cause en lui excède sa capacité à les masquer.
Elle se dit qu’il est devenu fou de désir. C’est comme offrir un repas somptueux à celui qui meurt de faim : rien de plus dangereux que passer brusquement de la misère à l’opulence. Elle ignore que la solitude a rongé en lui, insidieusement, jusqu’à la moindre étincelle d’espérance. Elle voudrait bien que, quitte à ce qu’il reste sur ses genoux s’il le veut, il se redresse un peu et lui suce la chatte qu’elle a en feu. Mais il n’en fait rien et elle n’ose pas lui demander explicitement ce dont elle a envie, alors elle se caresse elle-même, lentement, passionnément, et jouit en arrosant la tête de l’homme de gouttes de cyprine. D’autres larmes brûlantes de sa féminité s’écrasent sur ses orteils. Il lèche ce nectar. Elle frémit sous les petits coups de langue sur ses petons humides.
Puis, sans changer de position, il se masturbe, éjacule sur les pieds et lape son propre sperme.
Il s’en va. Elle sait qu’ils ne se reverront jamais. Plutôt que prendre une douche, sans attendre, elle va laver ses pieds dans les vagues de l’océan, seule sur la plage nocturne. Les humeurs mélangées de leur rencontre sont une offrande aux éléments. De ce moment unique, ils s’en souviendront toujours.
Elle lui a offert sa culotte rouge : ultime cadeau afin d’unir leur tendresse éphémère et la transformer en joie durable.
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