Résumé
S’étant provisoirement résignée à travailler comme femme de chambre au service d’un Monsieur âgé et de son rejeton, Francesca raconte les soucis de son quotidien à Ann, une amie intime un peu perdue de vue.
D’abord très choquée, cette dernière finit par se montrer plus compréhensive.
L’histoire se passe à Paris, dans le quartier des affaires.
L’héroïne ouvre la porte à son amie en disant :
« Entre vite ma chérie, nous sommes seules.
— Wouah, Francesca ! T’es vachement sexy dans cet uniforme !
— Pour vous servir, Madame.
— Putain, si j’étais un mec, comment je te sauterais dessus.
— Hou là, tout de suite les grands mots !
— Est-ce que tu connais un mâle qui resterait indifférent devant une aussi jolie soubrette que toi ?
— J’en sais rien, mais entre nous, on pourrait rêver à des métiers plus épanouissants.
— C’est vraiment ton job en ce moment ?
— Bah oui.
— Attends, je crois avoir deviné… Il y aurait pas un plan cul, là-dessous ?
— Quel genre ?
— Histoire d’amour avec un bel employeur.
— Oh non, au contraire ! Qu’est-ce qui te fait penser que j’aurais pu manigancer un truc aussi curieux ?
— En te regardant, on comprend tout de suite pourquoi le fantasme de la petite bonne est si répandu.
— Tu es gentille.
— Non, sincère.
— Le revers de la médaille, c’est que ça me donne l’impression d’être le cliché de service.
— Un grand pouvoir de séduction est en général considéré comme un atout, Francesca.
— Ça dépend de qui on séduit, Ann.
— Mademoiselle préfèrerait être un thon ?
— Pas vraiment. Mais ça n’empêche que je me passerais volontiers de certains soupirants.
— C’est clair que l’idéal serait de pouvoir choisir, mais tu sais ce qu’on dit à propos de la lune.
— Je rêve quand même aussi d’un truc qui me permettrait de me débarrasser des plus lourds. Surtout que ce ne sont jamais les mieux. Voilà pourquoi je n’aime pas trop être le cliché de service.
— Francesca, tes milliers de consœurs ne sont pas que des lieux communs, elles existent.
— T’es certaine ?
— Enfin bon, le principal, c’est que ce soit bien payé.
— Ah ça, je ne peux vraiment pas me plaindre.
— Pourquoi tu ne m’as rien dit au téléphone ?
— J’avais trop envie de voir ta réaction.
— Il n’y a aucune de raison de le cacher, c’est presque comme femme au foyer.
— T’inquiète pas, tout va bien.
— En plus, ton look est super classe. Aucun rapport avec la sempiternelle french maid des films à deux balles.
— Alors là, j’aurais jamais accepté de porter ce genre de fringues.
— Regardez-moi ça, quelle élégance… Cette petite robe noire te va à merveille.
— Elle est faite à mes mesures, ma chère. Par un couturier du VIIIe.
— La classe !
— Hé oui, ceci me console un peu de mon humble condition de servante.
— Ne dis pas ça.
— Ben quoi ?
— Pour moi, c’est en grande partie ce côté très réservé qui te rend si attirante.
— Je préfèrerais quand même me passer de ce tablier et de cette coiffe.
— Dans ce cas, ce ne serait plus un uniforme.
— Justement.
— T’en fais pas, la qualité des tissus et de cette dentelle saute aux yeux. Et pareil pour la coupe.
— Mon patron exige ce qui se fait de mieux.
— Alors il doit avoir pas mal d’argent.
— Pété de thunes, à mon avis. Mais ne t’emballe pas, Monsieur est trop vieux pour nous.
— Et marié, je suppose.
— Divorcé avec un fils.
— De quel âge ?
— Seize ans, d’après le gamin. Mais je suis persuadée que c’est moins.
— Tu as demandé au père ?
— Oui, il m’a répondu : « Est-ce que mon fils est un menteur ? ». Donc je n’ai pas insisté.
— Son héritier va encore au lycée ?
— Il y est pour l’instant. En principe.
— Dans quelle classe ?
— Troisième.
— C’est vrai qu’à moins d’avoir doublé et redoublé…
— En effet, seize ans, ça m’étonnerait beaucoup.
— Il est grand comment ?
— Laisse-moi réfléchir. Disons… trois pommes.
— Tu rigoles ?
— Oui Ann, personne n’est aussi minuscule.
— Mais il est quand même très petit.
— Difficile de se baser là-dessus, puisque son père n’est pas beaucoup plus grand.
— Je peux te poser une question indiscrète ?
— Vas-y.
— Pourquoi tu as accepté ce boulot ?
— Il n’y a pas de sot métier, t’aurait rétorqué Antoine Le Roux de Lincy.
— C’est qui ?
— Un historien du 19e siècle.
— Comment tu sais ça, toi ?
— Internet a réponse à tout, il suffit de demander.
— Non mais sérieusement Francesca.
— Avec la crise, impossible de trouver un emploi qui correspond à mes diplômes. Ou alors, soit le patron, soit le DRH me fait assez vite comprendre qu’il suffirait que je m’allonge sur le canapé pour avoir plus de chances d’être prise.
— Même pas la certitude ?
— Ça dépend dans quel sens tu l’entends.
— Ah oui, évidemment.
— En plus, ici, je ne travaille qu’un jour sur deux.
— Avec un très bon salaire, malgré ça ?
— Non seulement c’est bien payé, mais je peux aussi disposer d’une grande maison dans le XVe, avec un jardin, un garage et une petite bagnole pour faire les courses.
— C’est vrai que là, il n’y avait pas à hésiter. Si je comprends bien, tu es en même temps la gardienne de cette bicoque.
— En effet.
— Elle sert à quoi à ton boss ?
— Il y reçoit du beau monde quelques fois par an. Mais dans ce cas, ce sont des professionnels qui s’occupent de l’intendance. Moi, je joue à la maîtresse de maison traitée avec tous les égards qui lui sont dus. Hé oui !
— Donc, ce jour-là, tu as le droit de t’habiller en civil, si j’ose dire.
— Monsieur m’offre chaque fois une nouvelle robe, ma chère.
— Et le reste du temps, qu’est-ce que tu fais là ?
— Ce que je veux, du moment que l’entretien est assuré. D’ailleurs, si tu ne repartais pas ce soir, je t’aurais reçue chez moi.
— Carrément le job en or.
— Hé oui. Par beaucoup de côtés.
— Pas tous ?
— Malheureusement…
— Qu’est-ce qui cloche ? Le vieux te serre de trop près, malgré son âge ?
— Pas lui, son fils.
— Aïe !
— Comme tu dis.
— Quel est le prénom de ce garçon ?
— Badji.
— C’est à cause de lui que plaire te dérange parfois si fort ?
— En effet.
— Il a l’air de quoi, niveau physique ?
— Entre nous, assez moche.
— Pas de chance… Et question personnalité ?
— Le parfait enfant gâté.
— C’est-à-dire ?
— Paresseux, menteur, désinvolte, provocateur…
— Rien que ça ?
— Non, il est également capricieux et jaloux, si tu veux tout savoir. C’est le genre qui fait sa crise dès qu’on lui refuse quelque chose.
— Tu viens de le rhabiller pour l’hiver, là.
— Voilà ce qui arrive quand on laisse ses enfants tout faire.
— Et ses qualités ?
— Attends, je cherche. Disons pas mal de suite dans les idées.
— C’est tout ?
— Très gourmand, si ça te paraît avoir quelque chose de positif.
— Dommage pour toi que ce petit jeune homme soit aussi peu attirant, avec un père plein aux as.
— Ça va pas la tête ! Tu me vois accepter les avances d’un gamin ?
— Pourquoi pas.
— T’es complètement folle ! C’est inimaginable.
— Du calme, je ne disais pas ça très sérieusement.
— Regarde cette photo, là, sur le meuble.
— C’est lui ?
— Ouais. Comment tu le trouves ?
— Beaucoup trop jeune pour nous, c’est clair.
— Et son physique ?
— Difficile à dire avec une peau tellement foncée. Mais il n’a pas l’air aussi horrible que ça.
— De toute façon, même s’il était beau comme un dieu, je l’enverrais se faire voir.
— Pas très sympa.
— J’y peux rien, il y a blocage.
— Ah bon ?
— Un jour, ce garçon m’a promis une Rolex si je le laissais m’embrasser. Hé ben, j’ai même pas répondu.
— Tu as refusé un cadeau pareil contre un simple baiser ?
— Hé oui !
— Très surprenant.
— Tu crois quand même pas qu’il se contenterait d’un petit bisou sur le bout des lèvres ?
— Toute la question est là.
— Si ce n’était que ça, est-ce que j’accepterais ? J’en sais rien.
— Mère Teresa, sors de ce corps !
— J’aurais l’air de quoi, si son père nous tombe dessus ? Ou simplement s’il l’apprend.
— J’avoue qu’on a déjà fait plus classe. De toute façon, avant de s’y coller, il faudrait être certaine que ce petit jeune homme l’a effectivement en sa possession, cette fameuse Rolex.
— Tu serais prête à lui rouler une pelle en échange d’une simple montre ?
— Rouler une pelle, faut pas exagérer. Mais juste sur les lèvres…
— C’est vrai que tu as toujours été un peu cochonne, sans vouloir te flatter.
— Je parie qu’en étant certaine que ça n’irait pas plus loin, toi aussi, tu le ferais.
— Ça… c’est pas complètement impossible.
— Et de toute façon, il n’aurait aucun intérêt à en parler.
— Bon, attends. Puisque cette Rolex te fait tellement envie, je lui envoie un texto pour qu’il ne traîne pas en route.
— Hé, ho, pas si vite !
— Qu’est-ce qui se passe ?
— Laisse-moi le temps d’y réfléchir.
— Aucun souci, vas-y.
— Tu ne m’en crois pas capable, hein ?
— Non Ann. Malgré ta grande gueule, il faudrait que tu sois un peu plus libérée.
— La garce qui me provoque…
— Alors, ta réponse ?
— À vrai dire, j’ai quand même peur qu’il ne tienne pas sa langue.
— Ah ça, c’est clair qu’il essayera de te la mettre.
— Mais non, je veux dire qu’il en parle autour de lui.
— Donc ça ne t’intéresse pas ? Pour l’instant, bien sûr.
— Je le crains.
— Tu vois bien que je ne suis pas la seule à bloquer.
— Quels genres de problèmes as-tu eus avec lui ?
— Bah… un peu de toutes sortes.
— C’est-à-dire ?
— Comme son papa voyage beaucoup, la plupart du temps, on reste à deux.
— Et quoi, tu en as marre de ses déclarations ?
— Si ce n’était que ça…
— Il avait déjà essayé de t’embrasser ?
— Pire.
— De t’enlacer ?
— Encore pire.
— Purée… Jouer à papa-maman ?
— Non, pour ça, il n’est pas de taille.
— Normal, à son âge. Pour toi, la bonne dimension, c’est combien de centimètres ? Dans un état intéressant, je veux dire.
— Très drôle… Oh ça va, arrête de rire !
— J’y peux rien, c’est sorti malgré moi.
— Bon, puisque tu continues de faire l’idiote, même si Badji sait certainement très bien comment ça se passe, vu ses sites favoris, il n’est pas assez grand pour prendre une femme de force.
— Alors attends, je crois avoir deviné… Ses menottes auraient-elles tendance à s’égarer ?
— Malheureusement, c’est plus qu’une tendance.
— Sans que ça aille jusqu’à te pousser à partir.
— Si je me barre, tu sais quoi : plus de maison, plus de voiture, et je devrais me priver de beaucoup de choses.
— Hé ben t’as qu’à taper sur ses mains.
— Ça l’amuse encore plus.
— Dans ce cas, il reste la bonne baffe.
— Hors de question.
— Pourquoi ?
— Quand son père est absent, c’est lui le boss ici.
— Si jeune ?
— Hé oui ! D’ailleurs il ne se gêne pas pour me donner des ordres.
— Alors obéis, qu’est-ce que tu veux que je te dise.
— C’est ce que je suis bien obligée de faire. En y mettant des limites, évidemment.
— Comme ?
— Mercredi passé, il a vraiment exagéré. Mais bon, en même temps, je dois avouer que c’était un peu de ma faute.
— Avant de continuer, j’aimerais savoir quelque chose.
— Vas-y.
— De quelle façon tu t’adresses à lui ?
— En l’appelant Monsieur, comme son père.
— Et Badji ?
— Il dit Francesca.
— En te tutoyant ?
— Ben oui.
— Ça te paraît normal, vu votre différence d’âge ?
— J’ai été engagée comme servante Ann, pas comme préceptrice.
— Mouais.
— Pourquoi tu me poses cette question ?
— Son tutoiement et ton vouvoiement sont loin d’être anodins, ma chérie.
— Peut-être, mais ça ne servirait à rien d’essayer de le faire changer.
— Il n’est jamais trop tard pour bien faire.
— Oublie, son père me remettrait tout de suite à ma place. Et lui aussi.
— Faudrait quand même essayer.
— On voit que tu ne les connais pas.
— En effet… Bon, continue. Qu’est-ce qu’il y a eu, mercredi passé ?
— C’est assez délicat à raconter.
— Alors parlons d’autre chose.
— En fait, voilà… J’ai perdu ma culotte.
— Oh ? Tu déconnes ?
— Si ça pouvait être vrai !
— Faut pas demander comment t’étais bourrée.
— Encore plus con. On a joué au Scrabble
— Ça n’est pas possible, là tu te fous de moi !
— Je te jure que non.
— Tu as réellement misé ta petite culotte ?
— Oui Ann, j’ai fait une chose pareille.
— Contre un gamin ?
— Je l’avoue.
— Et si c’était toi qui remportais la partie, il devait te donner son caleçon ?
— Non, cinq cents euros.
— Ah ouais, pas mal.
— Et j’étais certaine de gagner.
— Mais tu as perdu.
— D’une façon totalement incompréhensible, puisqu’il n’avait jamais réussi à me battre. Et de loin.
— Peut-être qu’auparavant, il a mal joué exprès, pour que tu te méfies pas.
— Impossible, son vocabulaire est trop limité. En tout cas, pour m’avoir à la régulière.
— Alors quelqu’un aurait-il manipulé les lettres ?
— Ça me paraît être la seule explication.
— Si c’était tellement clair que ce garçon n’avait aucune chance, comment ça se fait que tu n’as pas senti le piège ?
— J’étais persuadée que Badji voulait seulement me provoquer, comme ça lui arrive très souvent. Donc je n’ai pas hésité. Surtout qu’il a quand même beaucoup d’argent de poche.
— Voilà ce qui se passe lorsqu’on est trop sûre de soi.
— Hé oui !
— On perd bêtement sa culotte.
— Exactement.
— En tout cas, c’était vraiment gentil de ta part, satisfaire ce fantasme-là.
— Je m’y suis résignée Ann, c’est pas du tout pareil.
— Ce souvenir a quand même dû le combler. Et ne parlons pas de ce qu’il en fait.
— Rien, car là, c’est moi qui l’ai eu.
— Raconte.
— Au départ, sa grosse erreur a été de ne pas préciser que j’étais obligée de la lui remettre. Donc, elle a valsé dans le vide-ordures. Comme ça, aucun danger qu’il la récupère.
— Bien joué.
— Badji râlait comme un pou, mais moi, je me marrais en douce.
— Comment ça se fait que ce garçon ne t’a pas empêchée de la virer ?
— Je l’ai pris de vitesse.
— C’est ça… Mais dis-moi, si tu n’étais pas obligée de la lui donner, pourquoi tu n’en as pas profité pour te reculotter discrètement ?
— Il me suivait partout ; comme un petit chien.
— Quel lourdingue.
— Tu parles.
— Quoi qu’il en soit, j’admire ton courage. Personnellement, je serais incapable de baisser ma petite culotte devant un gamin. Et celui-là encore moins celui-là qu’un autre.
— Je l’ai prié de sortir Ann.
— Ça a dû le faire marrer.
— Pas tant que ça, en fait.
— Tu l’as ôtée devant lui, oui ou non ?
— Non, j’étais seule.
— Étonnant qu’il ait accepté de quitter la pièce… Tu as aussi pu fermer la porte ?
— J’allais pas lui demander la permission, qu’est-ce que tu crois.
— Ça ne l’a pas contrarié ?
— Peu importe.
— Donc, d’après toi, ce garçon aurait eu la délicatesse d’aller à côté.
— Tu n’as pas l’air de le croire.
— Mais si, j’ai toujours confiance dans mes amies.
— De toute façon, ça n’avait rien à voir avec une quelconque forme de galanterie. Il s’est éclipsé parce que j’ai pas arrêté de lui répéter que sinon, je n’y arriverais pas.
— Et s’il avait refusé de te laisser seule ?
— Je l’aurais gardée.
— Alors pourquoi tu l’as enlevée ?
— Parce que c’est moi qui ai perdu la partie Ann, pas lui.
— La belle affaire.
— En plus, si je m’étais défilée, j’aurais eu droit à la toute grosse scène. Et plus tard, il se serait certainement vengé.
— De quelle façon ?
— J’en sais rien, mais dans ce domaine, on peut lui faire confiance.
— Tu aurais pu faire seulement semblant de l’avoir retirée.
— C’était bien mon intention. Mais Monsieur n’a daigné me laisser seule qu’à condition que je promette de lui en donner la preuve.
— En levant ta jupe ?
— T’es vraiment pas bien toi !
— Sinon comment ?
— Je lui ai montré ma culotte.
— Le vide-ordures n’en a pas voulu ?
— Très drôle.
— Alors explique-moi ce petit prodige.
— Je t’ai pas dit que je l’avais mise tout de suite à la poubelle.
— En effet… Bon, et puis ? Après t’être débarrassée de l’objet litigieux, qu’est-ce qui s’est passé ?
— Il me restait le ménage à faire.
— Encore heureux que ton uniforme a une longueur à peu près normale.
— Sinon je n’aurais pas pris ce risque.
— N’empêche que l’idée que tu n’avais plus de slip devait lui trotter en tête.
— Dans un premier temps, il n’y a pas eu de gros soucis. Il me balançait des vannes, évidemment, mais ça n’allait pas beaucoup plus loin. Jusqu’à ce que ses copains arrivent…
— Ah voilà, il a voulu faire le malin devant eux.
— Ça n’a pas raté, en effet. Si j’avais su !
— Il t’avait prévenue de ce que vous alliez avoir de la compagnie ?
— Bien sûr que non.
— Voilà qui semble confirmer le coup monté. Depuis le début, je suppose. Mais d’un autre côté, ce garçon n’était pas certain que tu relèverais son défi.
— Il ne risquait rien à me le proposer.
— Très juste… Bon, alors ? Qu’est-ce qu’il y a eu, après ça ?
— Badji m’a dit : « Tu vas traiter mes amis comme des princes, je veux qu’ils n’aient qu’à claquer dans leurs doigts pour être servis ».
— Sympa, cette façon de te parler.
— Surtout devant eux.
— Hé ben…
— Mais ça fait rien, j’ai l’habitude.
— Étonnant qu’à son âge, il soit déjà aussi autoritaire.
— Dans son pays, les femmes sont obligées de se soumettre aux hommes. Elles n’ont pas le choix. Alors tu penses, les servantes…
— Misère, ces pauvres filles doivent en voir de toutes les couleurs.
— Oh oui ! Donc voilà, je passais de l’un à l’autre avec les boissons et des petites choses à grignoter, quand tout à coup, Badji leur a balancé…
— … Mais quoi ?
— Il n’a rien trouvé de mieux que leur dire : « Hé les gars, vous savez quoi ? Francesca, elle a pas de culotte ! ».
— Quel salaud !
— J’étais d’autant plus gênée que ses copains devaient vraiment se demander comment il l’avait appris.
— Toute vérité n’est pas forcément bonne à dire, mais parfois…
— Non Ann, ça m’embarrassait trop.
— Parce que ?
— À cause de l’enjeu de notre partie. J’aurais jamais dû accepter une chose pareille.
— Là, je suis entièrement d’accord.
— Et accessoirement, parce qu’il m’avait bien possédée.
— Mais ça t’était égal que ses copains se fassent des idées au sujet de vos relations ?
— Bien sûr que non.
— Alors pourquoi tu ne t’es pas expliquée devant eux ?
— Avant de comprendre la tricherie de Badji, je pensais être la principale fautive. Donc, de mon point de vue, il valait mieux ne pas entrer dans les détails. Et puis je t’avoue que ça m’a complètement prise au dépourvu, l’entendre sortir un truc pareil devant ses copains.
— En les invitant, il a sans doute voulu se venger de ce que tu l’as frustré en jetant ta culotte.
— Tu lui aurais donné la tienne ?
— Je ne laisserai jamais un jeune garçon m’amener sur ce terrain, ma cocotte.
— T’as raison, j’aurais dû l’envoyer au diable. Dès le début.
— Ses copains ont réagi comment ?
— En me balançant de ces horreurs…
— Pas étonnant, car leur parler de ça, c’était vraiment les pousser à te manquer de respect.
— Et comment.
— Ils ont été très grossiers ?
— Oh ! oui, j’en ai entendu des vertes et des pas mûres.
— Dans quel genre ?
— Un truc qui revenait souvent, c’était : « À poil la bonniche ! ».
— Quand même très péjoratif, comme terme.
— À qui le dis-tu. Et c’était en se marrant comme des dingues, bien sûr. Dans cette bande, y en a pas un pour racheter l’autre.
— Tu les connais depuis longtemps ?
— Hélas oui. Avant cette affaire, ils n’arrêtaient déjà pas de me reluquer.
— Ça, on peut le comprendre.
— Certains étaient même venus chez moi.
— À quelle occasion ?
— L’anniversaire de Badji.
— Et il y a un risque qu’ils te relancent à ton domicile ?
— Ne me dis pas ça !
— Cette grande fille peut-elle vraiment avoir la trouille de quelques gamins ?
— Non, je suis certaine qu’ils n’oseraient pas me sauter dessus. Mais une bande de gosses qui se moque de toi dans la rue…
— Rassure-toi, on en meurt assez rarement.
— Les enfants sont parfois très cruels, Ann. Et j’ai des voisins.
— Ça m’étonnerait quand même que ces gosses aient assez de culot pour te harceler jusque chez toi.
— J’espère que tu as raison. Par contre, ce qui est certain, c’est qu’ils reviendront ici. Je vois aucun moyen de l’empêcher. Ni même de me défiler. Surtout qu’on ne se donne jamais la peine de me prévenir.
— Toute la question est de savoir s’ils ont cru ton petit patron.
— À quel sujet ?
— Un sous-vêtement jeté à la poubelle avec un peu de précipitation.
— En fait… j’ai pas essayé de nier.
— Hein, quoi ? Mais comment ça se fait Francesca ?
— La frousse qu’il se mette en tête de leur prouver que c’était vrai. Sans que je m’y attende, évidemment.
— Tu n’étais pas sur tes gardes ?
— Bien sûr que si, Ann. À fond même. Et pourtant…
— Il y est parvenu ?
— Changeons de sujet, s’il te plaît.
— Je vais avoir beaucoup de mal à te donner un conseil, si tu me caches des détails aussi importants.
— C’est incompréhensible sans l’avoir vécu.
— Bien, bien.
— T’es quand même pas fâchée ?
— Non, tu as parfaitement le droit de ne rien me dire. Mais dans ce cas, à quoi ça sert que je t’écoute ?
— C’est tellement gênant Ann.
— Alors tant pis. À un de ces jours, ma belle.
— Non, attends ! Ne pars pas !
— On se reverra, t’inquiète.
— Je t’en prie, reste.
— Seulement si tu promets de tout me raconter.
— … Bon, d’accord.
— Il me faut ta parole.
— Je te la donne, n’aie pas peur. Voilà… Tu as mille fois raison, j’aurais dû taper du poing, car c’est après ça qu’ils se sont vraiment lâchés.
— Quoi ! Encore plus ?
— Hé oui…
— Misère, qu’est-ce qu’il y a eu ?
— J’ai voulu recommencer à les servir comme si de rien n’était, mais le garçon qui était derrière moi…
— S’est penché pour regarder sous ta jupe ?
— Non Ann. Il m’a touché les fesses.
— Ouche ! Pas sous le tissu, j’espère.
— Tu plaisantes ? S’il m’avait fait ça, je l’aurais massacré.
— Alors ? Comment tu as réagi ?
— Après avoir posé mon plateau sur la table — sans me presser, pour qu’il se méfie pas — je me suis retournée d’un coup et la claque a volé.
— Bravo !
— Il l’a sentie passer, j’aime autant te le dire.
— Enfin un comportement d’adulte.
— Du coup, j’ai eu les rieurs de mon côté.
— Super.
— Ils se sont tellement foutus de lui que ça m’a fait chaud au cœur.
— J’espère qu’en plus d’avoir reçu une gifle, ton assaillant s’est fait engueuler par son hôte.
— En fait… non, pas vraiment.
— Concrètement, ça signifie quoi ?
— Badji s’est contenté de lancer à la ronde : « Faut vous y faire les gars. Ici, y a que moi qui ai le droit de la peloter ».
— Oh, le monstre ! J’espère que ce coup-ci, tu l’as bien remis à sa place.
— Pour être tout à fait sincère…
— Même pas ! Toujours cette frousse qu’il relève ta robe ?
— J’aurais voulu t’y voir.
— Non merci, sans façons. Bon, et après ça, qu’est-ce qui s’est passé ?
— Ils l’ont traité de vantard, de grande gueule, de menteur… Tous des trucs dans ce genre-là.
— Peut-être pas une excellente idée.
— Ah ça non !
— Comment il a réagi ?
— Ann, même si je me suis engagée à tout te dire…
— Tu viens de me donner ta parole.
— Je sais, mais c’est tellement pénible.
— On m’attend Francesca.
— Reste, j’ai trop besoin de tes conseils ! Je ne peux en parler à personne, à part toi.
— Alors vas-y.
— Tu me promets de ne pas te fâcher ?
— Oui.
— Et de ne le répéter à personne ?
— Parole de scoute. En revanche, si j’apprends que tu m’as caché des choses…
— Non, t’inquiète, je te dirai tout. Voilà. Quand je suis retournée près d’eux…
— Tu t’es de nouveau fait mettre la main aux fesses.
— En fait… Badji s’est contenté de me caresser la cuisse. Avec son petit air supérieur, évidemment.
— C’était où ?
— Dans le bureau, au premier.
— Non, je veux dire à quel endroit de ta cuisse.
— Ben… au milieu.
— Plus exactement ?
— À l’intérieur, quoi.
— Entre tes jambes ?
— En quelque sorte.
— Purée… Bon, continue.
— Petit à petit, je l’ai senti remonter.
— Me dis pas qu’il est allé jusqu’à ton sexe !
— Non. Par contre…
— Vas-y Francesca, vide ton sac.
— Quelques instants plus tard, c’est lui qui s’est mis… à me caresser les fesses.
— Ôte-moi d’un vilain doute. C’était à travers ta robe, comme le premier ?
— Même pas Ann.
— Wow ! Inutile de te demander si tu as osé le massacrer, j’imagine.
— Je ne peux pas me le permettre.
— Alors il a dû bien s’amuser, ce brave garçon.
— Que veux-tu, quand son père n’est pas là…
— Ben voyons ! Il a duré longtemps, ce petit jeu ?
— Jusqu’à ce qu’un de ses copains trouve malin de lâcher : « Je suis sûr que cette meuf a une culotte, sinon elle se laisserait pas faire ».
— Hou là, là… Alors, qu’est-ce qui s’est passé ?
Note de l’auteur
Si la suite des mésaventures de Francesca vous intéresse, elle se trouve sur le site « monBestSeller.com » au rayon « Erotisme ».
Titre : A bâtons rompus
Auteur : Halgoo
Enjoy…
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