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Fidèle

Fidèle



Dans son salon de coiffure, Marine était la patronne. Elle adorait son métier, même si parfois faire la conversation à de vieilles rombières jamais contentes n’était pas une sinécure. Et aujourd’hui, elles s’étaient donné le mot. Depuis le matin, elle n’avait eu droit qu’à ça.
Aussi fut-elle doublement heureuse de voir son client préféré arriver en fin d’après-midi. Un bel homme, grand, mince et brun, au charme ravageur. Il ne parlait que très peu, d’une voix grave, avec un léger accent dont elle ignorait l’origine, mais qu’elle pensait slave. En fait, elle ne savait quasiment rien de lui. Juste que sa présence la troublait, un trouble presque érotique. Peut être était-ce sa façon de la regarder, de ses yeux noirs qui semblaient la déshabiller. Peut-être se faisait-elle des idées.
De toute façon, elle était mariée, mariée et heureuse. Mais après tout, il n’était pas interdit de regarder et d’apprécier ce beau garçon. Même son prénom lui semblait sexy. Milo. Elle ne laissait à personne le soin de s’occuper de lui, même pour le shampooing.

Il posait sa tête dans le bac, et fermait les yeux. Marine pouvait admirer à loisir son visage, ses sourcils bien dessinés, son nez fin, la courbe virile de sa mâchoire, et sa bouche, sensuelle, gourmande… Ses doigts se perdaient dans son cuir chevelu, exerçaient des pressions, des petits massages, doux et fermes à la fois. De temps en temps, rarement, il laissait échapper un petit gémissement, comme un murmure. Alors elle se reprenait, pétrissait son crâne plus fermement, essayant de cacher son trouble.

Puis il s’installait dans le fauteuil, et elle lui coupait les cheveux. Elle se demandait comment elle parvenait à faire une coupe correcte, avec ses yeux noirs constamment rivés sur elle. Chaque contact avec sa peau, chaque frôlement de sa poitrine contre sa nuque l’électrisait. Il ne disait rien, se contentant de la regarder dans le miroir, fixement. Devinait-il son émoi ? Elle mouillait. Il lui faisait cet effet à chaque fois, mais encore plus aujourd’hui. Sans doute parce qu’elle avait passé une mauvaise journée, et qu’elle se sentait fatiguée. Elle avait un peu honte, se sentait coupable de fantasmer ainsi, sur ce bel homme presque inconnu, alors qu’elle était mariée et mère de famille. Mais après tout, elle ne faisait rien de mal !

Comme d’habitude, il fut satisfait de sa coupe, paya en liquide, laissa un généreux pourboire. Elle l’accompagna au fond du magasin, où un grand portemanteau faisait office de vestiaire. Il ne prit pas le sien, et continua de la dévisager, sans bouger, sans rien dire. Et alors qu’elle s’apprêtait à lui demander ce qu’il attendait, il l’embrassa. Un baiser brutal, qui la laissa sans réaction. En se collant à elle, il la fit entrer dans le petit local qui servait de buanderie, pour laver serviettes et peignoirs, et entreposer les produits de coiffure. Il referma la porte derrière lui. Elle tremblait, entre la peur et l’excitation. Il ne cessait pas de l’embrasser. Sa langue força l’entrée de sa bouche, il la mangeait, la dévorait. Elle sentait ses jambes se dérober sous elle et s’appuya contre un meuble. Elle ne voulait pas, mais son désir l’emportait. Il fit courir ses mains sur ses cuisses, remontant sa jupe, s’attardant sur le bout de peau libre au-dessus de ses bas. Elle tenta de protester : « Non, Milo, il ne faut pas, arrêtez … », de repousser sa main, mais tout son corps se tendait vers lui, vibrait sous ses caresses, l’appelait. Elle le voulait, elle crevait d’envie de lui, envie qu’il la prenne, là, debout, tout de suite.

Elle sentit sa main effleurer sa fente, se poser sur son ventre, se glisser sous l’élastique de sa culotte. Elle se sentit défaillir, tenta une nouvelle fois de reprendre ses esprits, de protester : « Il ne faut pas, je suis mariée… » Mais il n’arrêta pas, au contraire. Ses doigts se faufilant entre ses lèvres trempées lui arrachèrent un gémissement de plaisir. Elle renversa sa tête en arrière en se mordant la lèvre au moment où ils la pénétraient. Le plaisir la ravageait, son désir la submergeait. Il la doigtait puissamment, ses doigts longs et fins s’enfonçaient très profondément en elle.

Elle posa sa main sur son torse, et elle vit sa propre alliance. Le visage de son mari apparut distinctement dans sa tête. Son mari, ses enfants… elle ne pouvait pas tout gâcher, le trahir, briser sa famille. Elle cria : « Non ! ». Un non ferme et assuré cette fois, qui le fit reculer. Il la regarda un moment de son regard si noir, si profond. Mais elle ne flancherait pas. Elle ne cèderait pas. Il partit, la laissant chancelante, étourdie… Elle se mit à pleurer, sans savoir pourquoi. Peut-être parce qu’elle savait qu’elle ne le reverrait jamais…

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