MINA
I. Une rencontre
J’avais la chanson dans la tête, celle de Joe Dassin… Les Champs Elysées…
Cela faisait un bon moment que je croisais son regard.
Occupée à choisir mes derniers cadeaux de Noël, je n’avais pas vu sur l’instant ce beau jeune homme qui calquait ses pas sur les miens… Je prenais une allée, il attendait, puis me suivait lentement…
Une fois, deux fois, trois fois…
Je changeais de magasin et allait choisir un soutien-gorge pour le jour de l’an.
Mes quelques paquets aux bras je repérais quelque chose de très fête, coloré, ajouré… Juste le prix qui me fit tiquer… Pour l’ensemble non, à plus de 200 euros… J’hésitais pour ce modèle, il y avait ma taille. J’aperçus la silhouette, négligemment scotchée à une vitrine…
Je pris la décision d’essayer, entrais avec mes sacs dans la cabine… La vendeuse me sourit, puis tourna les talons.
Il m’allait, il soulevait mes seins sans les comprimer, les bretelles ne faisaient pas mal, une culotte noire fera l’affaire, j’ai d’autres priorités… Elle confirma, en reluquant mes formes…
« Il vous va bien »…
En sortant, je me dirigeais vers la caisse, mes sacs et mon achat entre mes doigts…
– Mince !
Le frêle vêtement avait glissé de mes mains… Je me penchais, il était là, derrière la caisse…
– Je peux vous aider, je vous vois en difficulté…
– Heu, merci, mais…
L’achat était déjà posé sur la banque, la caissière le prit, détacha l’antivol… Je passais ma carte…
Mes cadeaux et paquets, mon sac à main, je commençais…
– Je peux vous aider à porter quelques paquets jusqu’à votre voiture…
– Non, je…
– Je crois que vous êtes trop chargée, vous venez d’en perdre un…
Je dis merde en moi-même, une pochette traînait à terre… Oh, mais pour longtemps, elle était déjà dans les mains de mon chevalier servant…
– Bon, c’est gentil, je capitule… Mais je dois rejoindre mon mari dans un autre magasin.
– Oh, pas de souci, je vous accompagne et c’est tout…
Arrivés à ma voiture, je pose à terre ce que je peux, prends la clé, ouvre le coffre arrière, en un instant je suis libérée…
– Merci, cela m’a permis de ne pas en perdre d’autre… Au plaisir…
– Même pas un apéritif, il est l’heure pourtant…
– Merci, je viens de vous le dire, mari, cadeau de Noël, magasin Hi-Fi… Il attend…
– Vous êtes toujours à l’heure ?
– Euh… Oui… En fait non… Mais…
– Les magasins restent ouverts tard, il n’est que dix-sept heures, alors venez, regardez, il y a un bar, de la place et j’aimerais faire connaissance en tout bien, tout honneur…
– Oh, charmeur… Mais vous avez un âge sans doute bien inférieur au mien… Je me doute… 35 ?
– Pas loin, bravo, mais vous-même n’en êtes pas loin… Les différences s’estompent vite.
– Vous exagérez… Prenez vos lunettes… Ou alors, je viens de croiser une fée dans la cabine d’essayage…
– Non, je vous trouve très belle, un âge qui donne à la femme un corps épanoui, un visage serein, de nouveaux buts dans la vie, une retraite en vue, un mari un peu absent, des occupations associatives et sportives, de quoi s’entretenir… Vous respirez la santé, le plaisir de vivre… Mais sans relief… Je pourrais devenir votre jardin secret…
– Oh, merci… Mais jeune homme, je suis bien chez moi, avec mon mari, mes enfants, mes petits-enfants… Le jardinage je le fais à la main, dans mon jardin…
– Vous n’avez pas de jardin secret ? Pour vous retrouver ? Pour vous occuper de vous, vous libérer du poids de l’habitude et du quotidien, entendre battre votre cœur de nouveau, aimer, frémir lors d’un appel téléphonique, bâtir des fantasmes…
– Vous allez vite… Non, je ne veux rien…
– Demain, vous penserez à cette conversation, même cette nuit sans doute… Vous penserez : « Un inconnu qui m’aborde dans la rue et vient me dire que ma vie est plate et triste… Un godelureau sorti d’un HML de banlieue et qui s’ennuyait et cherchait à séduire une quinquagénaire… »
Non, je ne cherche qu’à découvrir votre secret. J’adore les petits sillons aux commissures de vos lèvres, comme un sourire éternel qui illumine votre visage, vos yeux noirs, perçants, énigmatiques. Vos formes de jeune fille, votre démarche altière, comme celle d’une lady habituée au monde, au luxe, une vie en société, des voyages, sûre d’elle…
– Oh !… Vous alors… Non, pas de luxe et pas défilé de mode !… Juste secrétaire, certes avec l’âge, un peu d’assurance dans ma voix et ma démarche… Le poids des ans et des responsabilités…
– Vous souriez et tout le parking s’éclaire… Venez quelques minutes, le temps de se réchauffer autour d’un chocolat ou d’un thé…
– Bon, vous avez porté mes paquets… Un quart d’heure c’est tout…
Il m’ouvre la portière, me sourit, et on se dirige vers l’établissement décoré pour Noël…
– Vous voyez… Vous voici assise, détendue, face à ce même inconnu que vous dévisagiez tout à l’heure prête à griffer…
– Non, je peux hélas mieux me rendre compte de votre âge… Vos 35 sont bien présomptueux…
– Si vous voulez, soit 30 alors… Ce chocolat vous va comme un gant, une boisson chaude, qui vient vous apaiser. Le chocolat va vous aider à passer le cap de ce risque que vous venez de prendre… « M’asseoir et discuter dans un bar, avec cet inconnu plus jeune que moi… Je suis folle… »
J’entends cette petite voix en vous…
– Arrêtez… Pas de voix, j’ai déjà pris un pot avec un homme en plein centre-ville…
– Pour faire quoi ? Aller à l’hôtel et vous donner à lui pour prouver que vous êtes toujours désirable, que votre libido n’est pas en sommeil et que le sexe fait encore partie de vos désirs ? Ou parce qu’il a piqué votre curiosité, écaillé votre lustre ?
– Vous exagérez. Je ne suis pas en manque et mon mari sait encore me satisfaire… Non, je ne couche pas à droite à gauche, et j’ai une sexualité équilibrée…
– Le petit rictus trahi un bémol dans vos paroles…
– Quel rictus ?
– Oh, une petite ombre, qui vous a effleuré, aux coins des lèvres… Juste une sensation de mensonge, non, de non-dit plutôt, comme un malaise…
– Ah ? Si vous mettez le doigt dessus faites-moi signe… Bon le quart d’heure est passé…
Il règle et m’ouvre la porte, nous sortons… Ses yeux me transpercent…
Il m’a eue… Ce freluquet de 20 ans mon cadet vient de me foutre le cafard pour la soirée…
Je n’ai pas fait l’amour depuis les dernières vacances, 3 mois au moins…
II. Tim
J’ai repris ma voiture et je suis rentrée chez moi, seule, face à ma vie tranquille, mes habitudes, ma solitude…
Cette façon de me voir… Quel mufle… Pas de respect, pas de délicatesse… S’il voulait me séduire, il s’y est mal pris… Et puis 30 ans ! 20 ans d’écart, voire plus avec la TVA…
Devant la glace de ma chambre, j’essaie ce soutien-gorge, avec une culotte noire…
Je bouge, marche, me penche… Aïe, il me faudra faire attention, ou le faire exprès…
Ca déborde sévère… La pesanteur…
Je rêvasse… Il vient me parler encore…
– J’ai envie de t’embrasser, tu es trop belle avec ce soutif provocant…
Dans la pénombre du soir, je lui réponds…
– Tes yeux m’ont faite craquer lorsque tu m’as raccompagnée… J’avais envie de rester encore un peu… Tu es intelligent, gentil, sans doute amoureux fou de moi… Un désir de draguer une inconnue seule et pas trop moche… Tes yeux bleus, comme l’azur maintenant me torturent. Tout ce que tu as dit n’était pas faux… Maintenant que je suis seule, que je t’ai perdu à jamais, je peux l’avouer…
Ma vie sentimentale est un échec, larguée il y a deux ans, 25 ans de mariage…
Ma vie sexuelle est un désert, aride… Une immensité de vide, que je comble au hasard, avec ma copine Danièle, depuis que mon mari est allé chasser ailleurs… Je pensais tenir… Je n’ai jamais été une folle de sexe. Je pensais avoir rempli honorablement mon contrat d’épouse, sans jamais rechigné, mais il en a décidé autrement…
Maintenant je vis comme tu le dis, d’ordinaires, de pseudos, de rêves…
Danièle est comme moi, un peu larguée, un peu naïve, un peu lesbienne, un peu facile parfois, par facilité, par dépit, par ennui…
Si mon Paul est parti voir ailleurs, je l’avais perdu bien avant dans mon lit…
Une lente descente… Quelques caresses, juste par habitude…
Je me disais que j’avais toute liberté pour me venger, pour combler ce vide…
Non, je suis trop ancrée dans mon quotidien, et là aussi tu as marqué des points… Associations, marches, danses, repas… J’y trouve parfois un amant d’un soir, en vacances aussi.
Avec Danièle c’est de la tendresse, juste de quoi subsister. Elle a des amants, elle m’appelle lorsqu’elle n’en a plus… Elle a essayé de m’entraîner… Bof, pas joli-joli…
Baise d’un soir, baise sans espoir…
On a essayé à plusieurs aussi, avec des copains de vacances. Bof, toujours pareil, mon cœur est resté neutre, mon ventre a apprécié le temps d’en jouir… Pas de signe d’amour, pas de rêve de toujours, comme à l’adolescence où la moindre caresse suscitait des promesses…
Tu es là, dans la rue, comme dans le centre commercial, à me chercher peut-être, à chercher ma voiture, à pleurer ce quart d’heure…
Trois journées de tristesse, puis Danièle qui appelle, oui, on se revoit très vite…
Un autre de parti…
Jeudi soir je fais les dernières courses. Si je dois le revoir… Après je tire un trait.
Je deviens folle, de penser à ce jeune, dont je ne connais rien pas même le prénom…
Je pense au film le Quart d’heure américain… Pour le quart d’heure d’échange… Pour une fois pas de sexe, pas de promesse, pas de mensonge, juste des yeux bleus qui se sont arrêtés à ma vie sans aspérités…
J’ai pris un chariot, j’ai besoin de manger… Mais je fais le tour des magasins, de l’un à l’autre, je le vois, là, tourné vers… Non, un enfant, une femme, des yeux noirs… Je le hais !
J’entre dans la grande surface, choisis mes yahourts, mes fromages, ma salade, un peu de viande, du surgelé, des produits courants, quelques boîtes de légumes, du vin rouge, mon apéritif préféré… Ah, du chocolat en poudre, j’avais aimé…
Je fais la queue, je passe en caisse… Je fais tomber ma monnaie… Il est là, me tend ma note…
– Bonsoir !
– Bonsoir… Vous me surveillez ! Vous n’avez pas de chariot ?
– Pas besoin…
Je pousse vers la sortie…
– Je vous accompagne à votre voiture, je la connais maintenant… Plus que vous presque…
– Oh… Si… Merci pour la note… Je vous dois quelque chose alors… Un apéro…
– On ne se doit rien, on n’a pas flirté, on n’a pas parlé de nous, de nos vies, je ne sais pas votre prénom… Avez-vous réfléchi à ce que je vous ai dit ? Sur votre solitude, sur vous… J’ai été cruel… Indiscret, médisant sans vous connaître, je vous ai jugé…
– Oui… Mais que de compliments…
– Et ?
– Vous… Vous aviez raison, j’ai repensé à vous la nuit suivante, dans le noir de ma chambre, l’esprit apaisé, seule…
– Et ?
– Je me suis acheté du chocolat en poudre…
– Seule dans votre chambre ?
– Longue et triste histoire d’une vie monotone…
– Vous êtes mariée ?
– Officiellement, oui…
– Et ?
– Seule, il est parti vivre avec sa secrétaire…
– Vous attendez en vous disant que ça va lui passer ?
La question me fait l’effet d’un poignard… J’étais en train de ranger le dernier paquet dans le coffre que je referme violemment en me retournant…
Il est surpris.
– Oh, j’ai touché un câble sous tension…
– C’est ma faute… Je n’aurais pas dû vous parler, ni vous écouter d’ailleurs.
– On peut recommencer plus normalement : « Bonjour je suis Tim, je travaille ici, dans un magasin du centre commercial. J’ai 29 ans, célibataire. J’aime la photo, la poésie, la musique, l’art en général, les voyages. J’ai un studio, une voiture, j’ai eu des poissons, une amie, je ne suis pas anar, je ne me drogue pas…
– Je suis Mina, 56 ans, séparée, retraitée anticipée. J’ai deux grands enfants à l’autre bout du monde. J’aime le sport, la marche, la nature, la musique, l’écriture. Et beaucoup de choses diverses, cuisine, pêche au gros, plongée, parachutisme.
– Vous n’avez pas cité les hommes ?
– Vous n’avez rien dit des femmes…
On se regarde, je lui souris…
– 06.43.25.XX.XX
– Oh, il me faut le marquer…
Je monte dans ma voiture…
– C’est dommage, je finis dans un quart d’heure.
– J’ai acheté du congelé, je dois rentrer chez moi rapidement.
– Resto ce soir ? Ciné ? Balade ?
– Je n’ai pas le temps… Non merci… C’est gentil…
– Ah ! Trop vite ? Trop impétueux ?
Je regarde ses yeux braqués sur moi qui me détaillent, me dévisagent… Je serre mon volant de toutes mes forces…
J’entends quelque chose me dire, me parler, se tordre, crier… Mon ventre !
– Il ne fait pas très chaud, mon congelé peut vous attendre un quart d’heure, je vous invite…
– C’est quoi comme surgelé ?
– Du poisson, autant le préparer ce soir… Si vous aimez le saumon…
– Vous aimez le vin blanc ?
– Avec modération, je vous vois venir…
Vingt minutes plus tard, il monte à mon côté, je démarre sec, je suis nerveuse comme une collégienne…
III. Bingo
Je lui fais les honneurs de ma villa, il sourit…
– On n’a pas le même patrimoine…
– Ce n’est pas tout à moi… On va prendre un apéritif.
On s’installe au salon après avoir vidé ma voiture. J’ai sorti de quoi dîner du congélateur, Saumon, Pavé de bœuf…
– A notre rencontre…
– Elle n’était pas naturelle, vous m’avez suivie, abordée, draguée…
Nous trinquons…
– On se tutoie ?
– Ah, je te dois le respect… Voudras-tu me tutoyer ?
– Je pense que je vais faire l’effort, du moins pour ta persévérance…
– Alors tu as pensé à moi le soir en rentrant… Ce que j’ai dit n’était pas si faux…
– Non… Surtout le vide de ma vie. Après le départ de Paul, je ne croyais pas… J’étais incapable de réagir. J’ai rencontré Danièle, lors d’une marche… On a parlé, même cas que moi, même âge, même milieu, même éducation… Elle a souri lorsque je lui ai dit que j’allais me venger de lui… En fait elle m’a entraînée, je n’aurais pas eu la force de sortir seule… On a appris à se connaître, à sortir souvent ensemble, chaque semaine.
Elle collectionnait les aventures, sans complexe. Elle rentrait rarement seule quand elle se mettait en chasse, elle m’appelait ensuite, me racontait un peu…
Ça durait un soir, une semaine, un mois, elle me rappelait, pleurait…
Un soir, ici, elle a craqué. On est devenues amantes à mon grand étonnement car je n’étais pas lesbienne… Cela m’a fait du bien, j’ai appris la femme, j’ai trouvé la tendresse, l’écoute, la sécurité… Nous sommes amies maintenant…
Bref, j’ai eu quelques amants aussi, comme elle, en boîte, en vacances… Mais rien de sérieux.
Oh, et puis je peux te le dire…
On a essayé de varier nos plaisirs, partager nos amants, pour pimenter nos soirées. J’avais du son et de l’image, je ressentais son plaisir, c’était grisant…
Les hommes aiment ça…
Ils devenaient plus actifs certes, mais étaient moins tendres. Ils en oubliaient la femme au profit du sexe. Ils venaient pour baiser, aimaient nous dominer, nous échanger dans des jeux… Et puis un soir, ils ont essayé de nous partager en nous présentant des copains dans un bar…
Danièle aimait se lâcher, elle ne voyait pas le mal, elle expérimentait des situations, me parlait de ses fantasmes, elle allait sur des sites dans le WEB, elle se droguait de sexe pour oublier sa solitude. J’ai eu peur, j’ai abandonné.
Peu de temps après elle a compris…
Je l’ai vue arriver chez moi en pleine nuit, ivre et droguée…
On n’a plus recommencé ce genre de truc. Tu comprends mes réticences avec les beaux parleurs…
C’est ce soir-là qu’on est devenues amantes, notre amitié s’est teintée de rose, mais nos ébats restent assez rares, le mental est plus précieux, être ensemble pour parler, pour passer de bonnes journées, marcher.
On n’a pas changé nos habitudes, on ne s’aime pas d’amour, le sexe est un plus dans nos moments de doute, il nous sert à nous passer des hommes lorsque notre libido déborde d’intensité…
Voilà, tu sais tout ou presque de ma vie…
– Oh, je ne pensais pas à mal en parlant… Chacun porte sa croix. Si moi, je n’ai pas encore trop pris des baffes, j’ai eu mon lot. Femmes qui me trompaient, des erreurs de choix, voyages et tentations, chômage, drogue mais pas des dures. Puis le renouveau, une amie pendant 5 ans, mais c’est fini depuis 1 an. J’attends la princesse charmante…
Je n’ai pas eu de relations homos, ni plurielles, ou rarement, pour essayer. Ce qui m’attire c’est la symbiose de deux êtres, de deux entités. La rencontre, le désir, la tendresse, donner et recevoir, sans penser à l’avenir, mais l’espoir se niche parfois…
Nous sommes faits pour vivre à deux, construire une famille, aimer…
Bon, on n’en parle plus, j’en sais assez, tu sais maintenant que je ne suis pas un violeur déguisé, ni un assassin en puissance, quoique…
En tous cas ce que tu prépares sent délicieusement bon…
– On mange ? Je vais préparer la table, continue l’apéro, regarde dans les CD si tu veux de la musique…
Je suis comme sur un nuage… Si Danièle savait… Je sens que je vais le faire…
Il est beau, il a l’air de m’apprécier.
Quoi, je ne sais pas ? On verra… Mais au moins avoir du plaisir avec un jeune, c’est rare, surtout comme celui-là… Un trentenaire tout de même…
Le repas est agréable, vin fin, rires, on se détend, on se raconte encore, quelques détails, quelques attentes, des pensées, quelques souvenirs…
Le sofa nous accueille, tout est dans le lave-vaisselle, il est gentil de m’aider.
Il sirote un cognac, je cherche un DVD…
– On peut s’en passer…
– Tu crois ? J’aurais aimé un fond sonore pour te prendre dans mes bras…
– Je peux le faire si tu t’y prends bien !…
Ses doigts déboutonnent mon chemisier, ses lèvres sont sur les miennes, je fonds…
Je ne me reconnais plus… Je dégrafe, défais, retire, enlève… Autoritaire ? Cavalière ?
Pressée tout simplement…
Ses lèvres parcourent mes tétons, j’ai mal au ventre… J’ai envie de lui à en crier…
Je coule, nue contre lui, sous lui… Il est imposant, grand, svelte, beau…
Il multiplie les baisers, découvrant ma poitrine, la savourant avec délicatesse… Multipliant ses caresses… J’ai attrapé son sexe et le tiens bien serré…
On roule, on se tord… Je commence à remplacer la Stéréo…
– Le fond sonore…
Sa main découvre l’ampleur de mon impatience…
Alors on échange, on s’enlace, on se tord, on rit, on s’échappe, on revient, on se coule, on roucoule… On dessine, un beau soixante-neuf, un délice de saveurs mêlées, aux senteurs poivrées.
Sa hampe coulisse dans ma bouche, ample, suintante… Sa langue dans l’épicentre de mon plaisir broute sans répit, lèche, frotte, revient, savoure, tourne…
Mon pubis n’est pas rasé, pas besoin ; juste quelques poils blonds épars et soyeux, nature m’a gâtée…
Stéréo, multiplex, Hi-Fi…
Tout y passe, je gémis sous son joug, abandonnée dans ses bras… Je roule ses bourses sous mes doigts, salive son membre décalotté, au gland impressionnant, comme une ogive…
Il m’envoie au paradis avant que je ne meure, ses doigts tournent mon bouton, dans tous les sens, ils me pincent délicieusement à crier mon impatience…
Sa langue fouille encore, au plus profond qu’elle puisse, léchant bien au-delà de mon terrain de jeu, débordant du calice… Dois-je annuler le combat ?
Dans mes parties de sexe, je n’ai jamais voulu, seul mon ex avait la clé de ce paradis…
Ses doigts m’ont pénétrée, plusieurs, ensemble, formant un gros pieu qui déclenche un orgasme, le premier de ce soir…
Attentif, délicat, il me laisse délirer, garant de mon plaisir, de ma sécurité, me berçant dans ses bras, il savoure sa victoire…
Cependant, lui aussi est mur pour continuer…
Enorme, veiné de bleu, je le frôle lentement de mes lèvres entrouvertes… Il est prêt d’exploser…
Je patiente un instant, avant de tout gâcher, je ne sens plus ses doigts, ni sa main, ni ses lèvres…
On se retourne, il me veut maintenant !
J’ai soif d’être pourfendue par ce que je viens de chérir dans ma bouche depuis près d’une heure…
Savante ascension de nos désirs respectifs, je suis déjà à lui…
Je m’ouvre entièrement, genoux repliés, cuisses ouvertes…. Il veut m’embrasser…
Que de précautions, je rêve… Je suis au bord de défaillir de manque…
3 mois de privation, 3 mois d’abstinence !….
Juste le concours de Danièle, et nos ébats saphiques… J’en aime la tendresse, les caresses rassurantes, la douceur de ses doigts, et celle de nos étreintes.
Je feule mon plaisir quand sa langue m’emporte, on calme nos ardeurs, on savoure, on plane, voyage mutuel par nos doigts amplifiés, jusqu’à crier d’extase, libérées pour un temps, de ces tensions perverses.
Mais il manque un vrai sexe, et d’autres ingrédients.
Des bras qui nous étreignent à nous couper le souffle, des positions intimes, du désir sexuel, des pensées érotiques, des fantasmes enfouis, des orgasmes magiques où l’on sombre sans vie…
Ses mains parcourent mon corps, mes seins… Il les pince, les malaxe, j’ai un contact soudain dans mes poils pubiens… Or ses mains sont sur moi…
La nature est merveilleuse et le chemin royal s’ouvre sous son dard, traverse ma vallée, écartant sa voilette, jusqu’à la grotte ouverte, inondée de désir, béante, surexcitée…
Je tremble, je le sens, il est là, il pousse doucement !…
– Euh !… Oh !… Oh !… Ouh !… Oui… Viens !…
Il glisse… Je soupire, soulève mon ventre vers lui, écarte mes cuisses encore, offre mon intimité, prête à consommer…
– Oh !oooooooooooooh ! Ouiiiiiiiiiiiii !
Il est en moi !… Il est entré !
Immobile… Aux aguets, il attend…
Dès qu’il va bouger, je vais exploser, il le sent, il le sait… Ce calme avant la tempête…
Son souffle un peu bloqué… Ses yeux pudiquement fermés… Il savoure…
Le raz-de-marée est impressionnant !
Il est penché sur moi, donne des coups de reins, je jouis chaque fois, je le sens jusqu’au bout, buter dans mes organes, je jouis, je jouis, je crie et je jouis…
Mes cuisses s’enroulent autour de ses hanches, je le veux encore et encore…
Je pleure lorsqu’il s’arrête, je crie lorsqu’il me prend…
Je n’ai jamais connu ça…
Il continue à me pourfendre, me tenant par les cuisses, les hanches, les genoux, ouvrant le tout, se délectant de moi, plongeant dans mes entrailles, mais je le veux encore et encore, et je crie, et je râle, et je m’offre, indécente, heureuse à en crever…
Il jaillit, explose, tout m’échappe, je glisse hors du temps, je viens de perdre pied… Un orgasme de folie qui m’emporte dans les nues… Adieu…
Il est couché entre mes cuisses, allongé, épuisé, me recouvre toute entière… Le silence s’est fait…
Il est planté en moi, tendrement calfeutré dans mon fourreau ouvert, commençant à fuiter…
Il m’a prise !… J’ai joui au-delà de mes espérances, j’ai battu des records d’intensité vocale…
Il m’a donné sa vie, sa jeunesse, sa vaillance, son désir…
Que de plaisir !…
Je ne sais s’il a compris…
Je me fiche de tout, je suis comme un zombie… Mon plaisir si intense, cet orgasme merveilleux dans lequel il m’a emportée…
Je ne veux plus rien d’autre que vivre ces instants…
Je suis jeune et si belle, embrochée, enfantée…
Il me semble que rien ne peut m’arriver de mieux, de plus beau, de plus complet.
Rien ni personne, ne pourra m’enlever ce souvenir, irrémédiablement gravé dans mon corps, dans mon esprit…
Femme comme jamais… A 50 ans découvrir ce plaisir… 20 ans d’écart. 20 ans balayés…
Oui, je suis lucide, oui, je pense à toute vitesse à mes derniers amants, à mon mari, à mes frasques et nos essais avec Danièle. Jamais je n’ai été aussi heureuse après avoir fait l’amour.
Ce calme en pleine nuit après trois heures de combat amoureux, de lutte acharnée, de partage, de revirements, de passion débridée, sans retenue aucune, je lui ai tout offert…
Tim !…
– Oui ?
– Oh, tu dormais ?
– Un peu… Je suis dans un rêve… Je veux y rester…
– Moi aussi… C’est gentil… Mais je n’ai pas rêvé… Je ne sais par quelle manigance tu es arrivé sur ma route… Quel esprit a concocté cette rencontre… Un ange-gardien ? Une fée ? Celle de la cabine d’essayage… Je suis heureuse, libérée, comblée…
– Merci, n’en jette plus… Mais je peux rajouter sans trahir personne, ni moi surtout et sans mentir que je viens de vivre un conte de fée, qui se termine par une nuit d’amour, la plus belle, la plus intime, la plus intense que j’ai connue… Fusionnelle… Enchanteresse…
Nous sombrons dans nos rêves, reprenant nos forces, je me lève quelques minutes… Il est allongé, nu, sur le dos… Son sexe redevenu normal, si je puis m’exprimer…
Quelle nuit… Quelle sensation !… Ce plaisir fou… Peut-être ce sevrage de quelques mois, mes nuits avec Danièle qui m’ont inspirée…
Il est sept heures en ce dimanche… Je ne sais que proposer…
Est-ce une idylle, un début, un déclic, une porte qui s’ouvre ?
Comment lui faire comprendre que je ne serais pas contre reprendre un chocolat sur un parking en fête ? Laisser tomber mes sacs, me faire raccompagner, passer une nuit triste… Tim…
Je suis folle… L’eau m’a réveillée…
20 ans d’écart et tant de différences…
Il va te revoir quelquefois… Puis disparaître et faire partie des souvenirs de ta cinquantaine….
Il va rencontrer une fille de son âge, jeune, souple, belle à en crever, qui va le séduire, lui faire un enfant, adieu Tim…
Danièle !…
– Non ! Moi c’est Tim !
– Oh, je pensais qu’on devait se voir ce dimanche…
– Ah !… Je peux prendre une douche ?
– Oui, nous… je vais… téléphoner… A moins…
– Oui ?
– Tu veux rester ?
– Avec toi ? Ici ? Ce n’est pas sérieux, tu n’as rien compris alors…
– Quoi ? Ah ?… Je sais… Danièle les appelle Kleenex… On les tire, on s’en sert, on les jette…
– Je plaisantais !
Il me sourit…
– Ca fait con si on se revoit si vite ? Pas même le temps de passer me changer chez moi ?
– Mais si… Si tu reviens je serais certaine de ne pas avoir rêvé !
– C’est gentil, je te rends la monnaie… Tu sais la fée sur la cabine doit vraiment exister… Je suis émerveillé par ces instants ensemble. Je ne l’ai raconté que trois fois la semaine dernière avec les autres… Mais…
– Salaud ! Connard ! Dégage de chez moi !
Mon peignoir tombe, il bloque mes bras, je ne résiste pas, ses lèvres sur les miennes…
– Bien… Je vis un conte de fée depuis hier soir…
Allongé sur le dos, abandonné à mes mains, à ma langue, il me sourit…
Je m’apprête à réaliser ce que j’adore, me pénétrer, mener le bal…
Je viens de le chérir encore, après cette douche mixte…
Ce sexe qui m’a donné tant de plaisir cette nuit…
Il est trempé de salive, il sent mon savon-douche…
Je suis agenouillée, je l’enjambe, à califourchon…
Ses mains prennent mes hanches et me conduisent…
Il bute… Il est là !… Face à mon intimité…
Je bouge, il se repais de mes sucs, car moi aussi, je coule de désir…
Il se niche, là… Oh !… Oui…
Je m’abaisse… Il me perce, me traverse, me transporte… Je jouis en me prenant à fond…
Face à lui, je m’allonge, pénétrée par son dard solidement fiché dans mon fourreau…
Mon bassin va et vient et mes râles s’envolent, nos lèvres se rivent, il me tient contre lui, me guide, me donne le LA de ses sensations…
Mon corps épouse le sien, pleinement et notre coït devient insoutenable…
Cowgirl émérite, je le chevauche avec passion, emportée, mon plaisir monte… Monte…
Je jouis de lui, sentant son pieu se tendre, bouger, je me soulève, il glisse ses doigts dans ma vulve, sur mon clitoris… Je perds pied, mes seins sont érigés, je jouis de tendresse, d’être femme, de me donner, de le prendre… Il me palpe, excite mes tétons, arrive à les téter…
C’est infernal ce que je ressens… Tous mes nerfs sont excités, je vibre mon orgasme, cette fois, je m’envole, comme un oiseau géant, vers les sommets de l’amour…
Je serre mon vagin, il se déverse en moi, chaud, brûlant, vient encore m’embrasser…
Il me fait un enfant, je suis écartelée, il rentre de plus belle, me tourne et me reprend, mon bassin soulevé, une position machiste, mais pleine d’intensité…
Ses coups de rein m’emportent, ses coups de rein me brisent, son sexe va perforer, sortir par l’autre bout…
Je m’affale sur le ventre, épuisée, il continue à me prendre, levrette consommée…
Cette fois je le sens, il gicle dans mes reins, quelques gouttes ultimes que je prends dans ma bouche et le suce, le berçant, tendrement, maman du nouveau-né…
Je suis folle vraiment…
Mais mon esprit fécond, invente, part dans tous les sens…
Il s’est levé, a pris une autre douche, et un autre café. Il veut aller chez lui, revient dans quelques mois…
– Non ?
Je suis folle…
10h00… Je suis couchée, tremblante, fiévreuse, à moitié déglinguée… Je ne sens plus rien de mon corps… Je prends une douche chaude, retrouve quelques sensations… Le téléphone…
– Allo ? Danièle… Bonjour toi…
– Oh, mon amie… J’étais sous la douche…
– Seule ?
– Oh, depuis pas longtemps…
– …
– Non, ce n’est pas une blague, il vient de partir…
– Qui ? Ton rêve ?
– Non, un ami, un amant, un freluquet, un rêve si tu veux… Mais il est bien réel, vraiment, une nuit de folie… Et même ce matin, jusque sous ma douche et dans ma salle de bains, il m’a prouvé qu’il existe et m’a fait un bébé…
– Mina ? Ca va ? Tu… Tu vas bien ? On t’a droguée ?
– Oh, c’est parti d’un chocolat il y a quatre jours… Et puis voilà, tout s’est enchaîné, non pas de drogue, sinon, celle du plaisir, du sexe, de l’amour…
– Il revient ?
– Oui, j’allais t’appeler… Il revient m’enflammer… Il m’a déjà brûlé les ailes, le reste aussi… Je n’ai plus de plumes, je suis à poil…
– Tu es certaine que tu ne veux pas que je vienne ?
– Non, non princesse… Pas pour le moment… Je reste sur mon nuage…
– Même s’il ne revient pas ?
– Il n’a pas intérêt, il a pris ma voiture…
– Non ???
– Si. Je l’avais véhiculé pour porter mes paquets…
– Du centre Leclerc ?
– Exact !…
– Tu as bu avec lui ?
– Ben oui… Mais ce n’est pas ça…
– Il est beau ?
– Charmant, il a tout… La jeunesse, le physique, intelligent, tendre…
– Arrête !… Jeunesse ?
– La trentaine.
– Pas possible !… Tu t’es faite avoir par un minet !…
– Non, je ne le pense pas… Et s’il revient à midi, j’aurais raison…
– Bon, je t’appelle à l’apéro…
– Tu ne viens pas hein ? Pas tant que je te le dise !
– Tu as peur de la concurrence ? Ah ! Ah !
– Flûte ! Allez à plus, je dois essayer de m’habiller…
– Pourquoi tu es à poil ?
– Je viens de te le dire… Depuis hier au soir, j’économise…
– Tu t’es enflammée…
– Comme une boîte d’allumettes ! Hop !… Il a essayé de m’éteindre avec sa lance, mais c’était pire… Alors il est parti faire le plein…
– T’es saoule… Bon, je te rappelle…
Bizarre cette façon de douter que je puisse me faire sauter par un jeunot… On s’en est fait quelques-uns en boîte, elle ne rechignait pas à l’ouvrage, les pompait à la chaîne, en ramenait dans son lit comme un trophée…
Et moi, je ramasse une erreur ? Il va se barrer avec ma chignole ?
Mais putain, qu’est-ce que j’ai aimé son chèque… et le stylo qui l’a signé !….
Je suis décente, mon nouveau soutif, culotte noire et une robe d’intérieur, simple…
Je peux enfin réfléchir en buvant un second café…
Si j’ai aimé particulièrement le premier chapitre, j’ai perdu la tête dans le second… Jusqu’au bébé…
C’était tellement fort, tellement puissant entre nous, ses baisers, les miens, sa façon de me prendre après, de retarder l’échéance, de me faire un enfant avec douceur, amour, tendresse, me gicler après, s’endormir dans mes bras, fiché en moi… Quelle nuit d’amour, je ne peux pas appeler ça un coup d’un soir !….
Je me trompe, elle a raison sans doute, mais j’ai senti tant de tendresse, comme des ailes m’envelopper, me donner sa graine…
Tim, reviens ! Même juste pour me rendre les clés….
FIN
Marika842010 décembre 2017
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