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Romane et les plaisirs solitaires (ch1)

Romane et les plaisirs solitaires (ch1)



ROMANE ET LES PLAISIRS SOLITAIRES

Chapitre 1

Ludovic avait une mauvaise nouvelle à m’annoncer.
– J’ai trouvé du boulot. À Bergerac.
– Hein ? Mais c’est super au contraire. Je suis ravi pour toi.
– Ben oui, mais c’est fini, du coup, la coloc, tous les deux. Je te fais faux bond.
– Oh, mais c’est pas un problème, ça ! Je passerai une annonce… Je trouverai.
– Sinon, il y aurait bien ma sœur.
– Ta sœur ?
– Oui. Ça l’arrangerait de venir s’installer ici. C’est pas trop cher. C’est à deux pas de la fac. Et c’est calme. Mais enfin, t’as peut-être pas trop d’atomes crochus avec.
J’avais ent****rçu cinq ou six fois Romane, quand elle venait lui rendre visite. Elle était souriante, avenante, plutôt jolie. Il n’y avait donc pas de raison, a priori, pour que le courant ne passe pas entre nous.
– Oh, si ! Si ! Elle est très sympathique ta sœur. Alors autant que ce soit elle qu’un parfait inconnu avec qui je risque de me prendre la tête au bout de trois jours.

Et, dès la semaine suivante, elle s’installait en lieu et place de son frère. On s’est, d’entrée de jeu, très bien entendus. Et organisés : elle faisait le ménage et la lessive, moi, les courses et la cuisine.
– Je sens que je vais prendre des kilos comme des kilos avec toi. Vu comment tu maîtrises…
Le soir, on dînait ensemble. On en profitait pour faire un peu plus connaissance. On se racontait nos enfances. On parlait musique. Là-dessus on était intarissables. Équitation aussi, dont on était tous les deux férus. On plaisantait. On se prenait de grandes crises de fou rire pour des riens. On essayait aussi de se faire croire, sans jamais y parvenir vraiment, que nos études respectives – psychologie pour elle, sociologie pour moi – déboucheraient sur des avenirs de rêve.
Non, il y avait pas à dire, ça se passait plutôt bien. Pour tout. La télé qu’on regardait aussi peu l’un que l’autre. L’ordinateur du salon qu’on se partageait équitablement. La salle de bains que je la laissais, le plus souvent, occuper la première. Ce n’était pas totalement désintéressé : quand je m’y enfermais à mon tour, la pièce était encore toute gorgée d’elle. De la touffeur de sa douche. De sa présence. De son parfum. Je fermais les yeux. Je laissais les images m’envahir : ses seins que je m’efforçais parfois de deviner discrètement, sous ses tee-shirts, quand nous étions à table. Ses fesses, si joliment bombées, que je pourchassais des yeux dès qu’elle me tournait le dos. Je les cajolais ces images. Je les savourais. Très vite, mon plaisir surgissait, un plaisir délicieusement imprégné d’elle.

Trois fois par semaine, je me rendais chez un architecte qui, très peu doué en français, me rémunérait pour corriger et rendre présentables ses projets et ses rapports. Or, ce matin-là, j’étais à la bourre. J’ai avalé mon café à toute allure, enfourné, en catastrophe, mon portable dans ma poche. Un paquet de Kleenex. Ma clef USB, que j’étais pourtant bien persuadé d’avoir rangée dans mon sac, traînait encore sur la tablette de l’ordinateur. Je m’en suis emparé et j’ai dévalé l’escalier. Sauf que c’est en possession de deux clefs USB que je me suis retrouvé une fois là-bas. Deux Kingston rigoureusement identiques. J’en ai ouvert une. La première venue. Au hasard. Et je me suis trouvé devant une quinzaine de dossiers sobrement intitulés Romane1, Romane2, Romane3, etc. J’ai hésité. Pas bien longtemps. Quelques secondes. Et j’ai cliqué sur le premier. C’était une vidéo. Complètement nue sur un lit – ce n’était pas chez nous – elle s’attisait fougueusement le bouton, d’un doigt avide, les jambes écartées au large, la tête renversée sur l’oreiller, les yeux mi-clos. J’ai précipitamment fermé, vaguement honteux, vaguement coupable, de pénétrer ainsi, comme par effraction, dans ce qu’elle avait de plus intime. Et je me suis efforcé de me mettre au travail. Sans grand succès. Je ne pouvais penser qu’à ça, qu’à ce que j’avais là, à portée de main. Vingt fois, j’ai été tenté d’y retourner. Vingt fois, j’ai résisté. Et j’ai fini par craquer. Je n’étais pas un héros. L’occasion était trop belle. Je suis allé la retrouver. Son doigt tourbillonnait de plus en plus vite, se faisait de plus en plus exigeant. Elle a haleté, doucement gémi, brusquement clamé : « C’est ça ! C’est ça ! », s’est introduit le majeur et l’index de l’autre main dans son antre d’amour, les y a voluptueusement fait aller et venir. « C’est bon ! C’est bon ! C’est bon ! Oh, que c’est bon ! » Ses fesses se sont soulevées. Elle a donné de grands coups de bassin précipités vers l’avant. Et elle a rugi un plaisir qui a déferlé en grandes vagues moutonnantes. Le mien a aussitôt surgi, à grandes saccades éperdues.
Elle a repris son souffle. Et ses esprits. « Ouche ! Ce truc de malade ! Non, mais comment j’ai joui ! » Et elle est restée là, un bras sous la nuque, les yeux au plafond. J’en ai profité pour me repaître d’elle. Tant et plus. De ses seins en pente douce délicatement veinés de bleu. De son ventre. De ses cuisses. De ses épaules. Et de la douce fente restée entrebaîllée avec ses trésors rosés, tout ondoyés encore du bonheur qu’elle venait de s’octroyer. Elle s’est retournée, calée sur le ventre, m’offrant ses fesses, monts et vallons, que j’ai pu arpenter tout à loisir. Et tout s’est arrêté.
En bas la porte a claqué. Le pas de l’architecte dans l’escalier.
– Ça va comme tu veux ?
Ça allait, oui, merci. Et j’ai fait mine de m’absorber dans un document LibreOffice que je venais d’ouvrir en catastrophe. Sans parvenir à me concentrer le moins du monde. Trop de questions se bousculaient dans ma tête. C’était quoi au juste cette vidéo ? On la voyait s’y masturber, oui, bon, d’accord. Mais qui l’avait faite ? Elle ? Quelqu’un d’autre ? Dans quel but ? Et qu’est-ce qu’elle fichait sur la tablette de l’ordinateur ? L’y avait-elle oubliée ? Délibérément laissée ? Et le reste ? Les quatorze autres dossiers ? Je brûlais désormais de l’envie d’aller voir ce qui s’y trouvait. Et l’autre qu’arrêtait pas de me tourner autour, d’ouvrir des classeurs, de plonger dans des tiroirs. Quand il est enfin parti…
– J’ai encore un rendez-vous. Qui risque de durer…
J’ai poussé un ouf de soulagement. Et je me suis précipité. Romane2. On l’y voyait dans une salle de bains. Elle se ciblait avec la pomme de douche. Je l’ai regardée faire quelques secondes et puis je suis passé à Romane3. Un gode, cette fois. Un gode monumental qui lui procurait manifestement beaucoup de plaisir. J’ai tout arrêté. C’était du gâchis. Du gaspillage. Des vidéos comme celles-là, il fallait les savourer. Lentement. Patiemment. Une à une. À petites gorgées gourmandes. Et non pas pas les déflorer comme j’étais stupidement en train de le faire.
Et je l’ai dupliquée cette clef. Je pourrais ainsi me repaître d’elle tout à loisir. Il allait me suffire de remettre, aussitôt rentré, l’original en place et le tour serait joué. Ni vu ni connu.

Mais ça ne s’est pas passé tout à fait comme prévu. À mon retour, elle était aux quatre cents coups.
– Mais elle est où, putain ! Elle est où ?
Elle retournait la maison. Elle visitait tout. Les placards. La corbeille à linge. Sous les meubles. Les poubelles.
– Tu vas voir que je vais l’avoir perdue à la fac. Alors là, si je l’ai perdue là-bas ! Où pire encore, chez les Gorlier. Ah, elle va avoir bonne mine la baby-sitter.
– C’est pas ça que tu cherches ?
Elle m’a lancé un regard stupéfait.
– C’est toi qui l’as ? Mais d’où tu la sors ?
– J’ai cru que c’était la mienne, ce matin. Seulement quand je suis arrivé là-bas, je me suis rendu compte que…
– Ce qui veut dire que tu l’as ouverte. Oh, la honte ! Mais c’est moindre mal. C’est quand même moindre mal que si ç’avait été…
Elle s’est enfuie sans terminer sa phrase.

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