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L…

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Je n’ai pas de nouvelles de L. Ma petite japonaise flodorisée, ma petite blonde à croquer… Je connaissais les blondes, les blondinettes, les blondasses, les blondes vénitiennes mais les blondes japonaises ?! On n’arrête pas le progrès… A ce rythme là, avec la fin du communisme en Chine, on verra bientôt apparaître des chinois débridés ! Enfin ! Mon petit bonzaï me manque un peu, beaucoup… Dans quelques jours, elle s’envolera pour le Japon et finira ses études là-bas, sur son île volcanique à s’empiffrer de poisson cru en mode sushi, d’algues amères et visqueuses et de riz gluant.
J’aime à me remémorer avec ferveur la candeur diaphane de son gros-petit cul duveté, la langueur innocente avec laquelle ses petites mains potelées enfilaient ses collants bariolés… Sa féminité timorée de jouvencelle me désarçonnait pour me rendre à la guimauve rougissante de mes balbutiements pré-pubères. L’ingénuité de ma petite reine du slip en coton à poids, à coccinelles, à petits cœurs colorés me ravissait tout simplement. Pour moi, le coton et le lycra sont à l’imaginaire érotique ce que la dentelle, la soie et la flanelle sont à la vulgarité pornographique.
J’adorais observer L. s’habiller. J’ai toujours préféré, à la parade d’une femme qui se dénude, celle d’une femme qui s’apprête, se vêt, se farde… Je trouve ce spectacle intemporellement beau et salvateur. C’est pour cette raison, et pour d’autres aussi, que je n’ai jamais voulu décacheter tout ce fatras froufrouteux qui l’emmitouflait ; lever le sceau de cet adorable et mystérieux trésor. L. était mon tout petit jardin ; mon tout petit jardin à la fois secret et japonais.
Cette hébétude gauche avec laquelle elle réajustait, de l’auricularité de son index, la monture de ses lunettes sur son petit nez tacheté de rousseur. Sa façon bien à elle de s’esbaudir, de s’émerveiller comme une gosse, d’écarquiller sa myopie, de faire d’une fable légendaire un fait historique pour habiller la morosité d’onirisme. Ce tic, cette manière de ponctuer chacune de ses phrases d’un  »tu vois ? » qui avait le don tantôt de m’agacer, tantôt celui de me faire sourire. Et quand je lui contais une anecdote, ses  »c’est vrai ? » ponctuaient mon discours à tout bout de chant.
Chantante, sa voix l’était. Elle était empreinte d’une musicalité dissonante, d’une forme de langueur féline et d’un petit quelque chose d’enfantin et de grave à la fois… Un brin éraillée toujours, elle stridulait dans les aigus et se prélassait dans les graves.
Au moment de conclure ce bref chapitre sur L., mon portable se met en branle. C’est elle !
Allo !
Allo !
T’es où ?
A la maison. Et toi ?
Rue de l’arbre sec !
Je l’entends renifler au bout du fil…
Ca va ?
Nan !
Qu’est ce qu’il t’arrives ?
Je pars samedi matin.
Elle se met à pleurnicher de plus belle… Je ne sais plus quoi dire.
Ca ne va pas ? (Logique)
Nan ! Je n’ai pas envie de partir ! Je peux passer ?
Ben oui !
Je retourne chez TDM ( »tête de mangue », son mec…) chercher ton cadeau et j’arrive.
Ok ! Je t’attends…
Une demie heure plus tard, elle tapote à mon huis et, la tête coiffée d’un bonnet péruvien, son barda de sacs sur le dos, me regarde d’un œil larmoyant. Elle pleure sur le seuil et je reste penaud un instant – je suis toujours coi devant la tristesse des autres. En guise de consolation, je la prends maladroitement dans mes bras tandis qu’elle se mouche et qu’elle bave sur mon pull-over. Pis elle se ressaisit et m’aboie dessus parce que je froisse ses lunettes. Je reconnais bien là ma L. tout de rires et de larmes, de générosité et d’égoïsme, de calme et de tempête… Mon petit paradoxe ! Sa mini colère sèche ses larmes illico ! Elle entre la mine boudeuse, farfouille dans un sac et me tend derechef mon cadeau de noël – la trilogie Ayako de Osamu Tezuka – puis mon cadeau d’anniversaire – quinze grammes de psylos mexicains que nous devions ingurgiter ensemble depuis le mois de novembre. Enfin, elle se trémousse sur place, minaude, dodeline du chef, me lance une moue enjôleuse suivit d’un grand sourire lutin. Alors, ma raison s’égare et mon cœur me souffle qu’il l’aime !? Je fais le sourd.
Nous papotons quelques minutes car voilà bien un mois que nous nous sommes vu. Elle préfère passer son avant dernière soirée avec moi plutôt qu’avec TDM. Je m’étonne mais je ne pipe mot. Elle aborde le sujet d’elle-même et comme à son habitude, se met à conchier le pauvre bougre. Ce qu’elle aime selon toute vraisemblance, me confie-t-elle, ce n’est pas TDM mais l’idée de TDM. Que si l’imbécile un jour lui déclarait sa flamme, qu’il s’éprenait d’elle vraiment, s’occupait d’elle enfin, elle le laisserait choir, se délesterait de ce fardeau à la seconde même où il exprimerait un quelconque sentiment. Mais l’imbécile était aussi vide qu’elle était vaniteuse.  »Heureux qu’elle s’en rende compte » me dis-je intérieurement, soudainement atteint de mycophylie galopante.
Elle continue son laïus, me répète qu’il est intellectuellement limité, bec à foin – ce qui n’est plus un scoop pour personne – qu’il ne comprend rien à rien, qu’il est somme toute assez laid avec sa longue tête mangoïde, sa mâchoire prognathe et son acné juvénile. Elle me dit ne pas comprendre les sentiments qu’elle éprouve à son égard. Ce n’est pas la première fois qu’elle s’épanche de la sorte et je n’abonde plus dans son sens car je suis las de ses turpitudes. Je crachote une banalité mortifère pour clore le sujet :  »Hum ! Le cœur a ses raisons que la raison ignore, hum ! ».

Puis nous restons là, silencieux l’un en face de l’autre, l’œil scrutateur occupé à ausculter les petits lulus racornis que je trie religieusement en deux tas. Il y avait ceux qui, malgré le long voyage – en colis de Hollande – étaient arrivés indemnes et ceux qui avaient souffert du trajet. Je laisse les survivants pour plus tard et nous nous retrouvons devant un petit tas informe de psylos infirmes, tronqués, amputés, éparpillés… Un puzzle de psylos en miettes… Nous décidons en silence d’abréger leur souffrance et nous les engloutissons en bavassant comme s’il s’agissait de gourmandises apéritives… Malheur !!
Il est bien entendu inutile de raconter ce qu’il advint de nous dès que nos estomacs vides amorcèrent leur travail de digestion ; dès que le sang fut irrémédiablement contaminé par la sournoise substance psychotrope et que les premières ivresses se firent sentir… Nous avions ruminé l’équivalent de cinq champignons de petite taille… Heureusement !!
Surpris de l’effet presque immédiat – une demie heure environ – Nous décidons de nous allonger devant une parodie débile et hallucinés par les difformités des personnages verdâtres au faciès squelettiques et à l’hypertrophie crânienne – effet hallucinatoire impressionnant, distorsion de l’espace, omission du temps et lois universelles de la physique absolument révolues – nous rions, rions, franchissant les limites décentes de l’hilarité pour toucher aux confins extatiques d’un bonheur intégral. L. pissa mièvrement dans sa culotte en coton vert pomme et humecta mon matelas sans alèse quand étonné de m’être métamorphosé en nain gigantesque, je me mis en tête d’abolir les privilèges nés de la révolution muni de ma paire de lunettes à éclipse et armé de mon pistolet à eau bénite ! Pleurer de rire et se pisser dessus, voilà ce que nous fîmes cinq heures durant.
Ce fut notre dernière soirée ensemble. Nous confiâmes l’intangibilité mystique de nos corps las au sommeil matutinal. Je ne dormis pas ce matin là… L. s’endormit incontinent. L. avait la faculté de s’endormir en quelques secondes dès qu’elle le désirait ; quand elle ne le désirait pas aussi ; elle était un peu narcoleptique. Elle ronronna, ronfla, tandis que je me débattais avec mon corps, avec mon oreiller et ma couette pour dénicher la position adéquate au repos de mes fibres… Mon œil se clos à huit heures pour se rouvrir à neuf heures. Je la laissais, veloutée, gorgée de quiétude, à la plénitude de ses rêveries olympiennes. J’aimais l’observer à son insu, quand elle ne jouait pas. C’est devant son minois que ce matin là, le vers de Baudelaire, qu’on aurait cru écrit pour cette circonstance, prit toute sa teneur et tout son sens :  »Là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté ».
Ce vers ? Un hommage à la béatitude contemplative d’un homme heureux devant l’œuvre : le divin tableau de la femme endormie… Je retrouvais l’espace d’un instant, cette foi en l’humanité que j’avais égarée. La femme, prodige d’éternelle magnificence, de surcroît si elle est endormie – taxez moi de misogynie – possède en elle le don – mystère et boule de gomme – de vous faire croire en l’homme !

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