Une copine DRH a une théorie. Loin de réprimer les relations sexuelles
sur le lieu du travail, il faut plutôt les favoriser. C’est un ciment
entre collaborateurs. Il n’est pas de meilleure énergétique que la
libido. Combien de mal baisés ont obtenu réparation au bureau. Il est
notoire que nous passons là la majeure de notre existence. Le conjoint
n’est pratiqué que les soirs et les bribes de vacances pour les
résultats que l’on sait. Autant s’envoyer en l’air au bon endroit. Qui
plus est cela suscite cancans et médisances et rien n’est meilleur pour
le moral que de dire du mal de son voisin.
Je n’avais pas attendu qu’on théorisa de la sorte une pratique à
laquelle je sacrifiais. Tel M Jourdain je me procurais ce bien sans
savoir. Spontanée et nantie d’un sûre instinct, je devinais d’emblée que
ce pouvait être le plus court chemin vers le succès professionnel. Quand
on est bien pourvue physiquement, il faut exploiter sans scrupule ce
capital. Au premier jour la petite nouvelle est dévorée du regard par
les loups de la boite. Ceux-ci sont sur les rangs. C’est à qui sautera
la petite. Chacun se poussant du coude. Cependant le Roi-soleil
emportera le morceau s’il daigne considérer la petite.
C’est une expérience à y songer maintenant qui est assez affreuse. Il
n’est pire bizutage. J’oserais comparer cela au sort du petit nouveau
qu’on introduit si je puis dire dans la cellule de prison. Il passera
immanquablement à la casserole, dépucelé du petit trou. J’avais 24 ans
mariée de fraîche date. Je devais deux ans plus tard concevoir un
premier enfant. J’étais encore dans la béatitude d’une union où le sexe
ne pouvait se concevoir qu’avec le l’homme de sa vie. On ne m’avait pas
prévenu que le pôle commercial d’une multinationale pouvait être un nid
de prédateurs.
Mes copines qui étaient passées par là s’étaient gardés de me rencarder
trop contentes qu’on put humilier une petite bourgeoise. Tel Justine du
roman, je crus être sauvée en me réfugiant auprès du patron, gros homme,
archétype du paternaliste qui par certains traits ressemblait à mon
grand-père lequel m’avait fait sauter sur ses cuisses quand j’étais
petite. Vous pouvez apprécier à quel point j’incarnais cette idiote de
la fable. Sûrement que cette innocence ajoutait à mon charme. Les tigres
autour se pourléchaient de mon genre de victime. J’étais vouée à un
carnage. L’affaire fut vite pliée.
Le piège fut des plus grossiers. Le boss me fit valoir l’honneur qu’on
me faisait de m’adouber en secrétaire d’occasion. Nous partions deux
jours à Francfort pour un forum important. En un court instant je devais
ingurgiter une foule d’informations. Tout cela était joué. On me mettait
à l’épreuve. On obtint que je fus sous pression. Complètement paniquée.
Je voyais poindre la catastrophe et que je ne pus être à la hauteur. Me
rétrograderait-on au plus bas échelon ? Ma pauvre carrière
s’achèverait-elle ici ? Le patron m’amenait là où il voulait, créature
vulnérable. En fait tout se passa bien.
Par trop soulagée le dernier soir, je dis au patron durant le pot de
départ que je lui devais beaucoup et que cela avait été une expérience
inoubliable. Je bus plus que de raison. Il me ramena dans ma chambre
d’hôtel. J’étais ivre. Je perçus vaguement que non content de me
déshabiller, il en faisait autant. Peut-on parler de viol ? Je n’eus que
peu de sensations. Quoiqu’il il usa et abusa de moi. Le plus dur était à
venir car revenue à moi au matin, je découvris cet homme ronflant tout
près de moi. Que faire ? J’eus peu à réfléchir, le boss se réveilla de
bonne humeur. Machinalement il m’embrassa sur la bouche. Que faire ?
Tout s’ensuivit au trot plus qu’au galop.
Nous fîmes l’amour. Éberluée je le suçais et concéder une levrette. Hors
moi tout autre eût rit de ce comique. Je dus jouer la comédie affectant
d’être contente de baiser avec mon patron. Il m’assura que j’avais
désormais le pied à l’étrier. Que ma promotion était assurée. Tout le
long du retour je dus subir ces caresses et être foutue debout dans
l’espace réduit d’une toilette de TGV. Tout était allée si vite. Ce
n’est que chez moi que je repris mes esprits. J’aurais voulu crier dans
le miroir que je me faisais horreur. Que je n’étais pas une putain. Ma
culpabilité se tint coi. J’en fus première étonnée.
Il est vrai que comme tout homme, mon patron ne sut tenir sa langue. Il
marquait son territoire en signifiant aux autres qu’il avait attrapé la
petite et que celle-ci était dessous ses airs de communiante, une petite
salope. Les messieurs ne sont pas à une exagération près. Bref je dus
rapidement gérer de nouvelles sollicitations d’autres hommes. Pour la
majorité, ils avaient pouvoir hiérarchique sur moi. Ils pouvaient nuire
à ma carrière. Les chimères du harcèlement sexuel n’ont pas cours ici.
Les autres femmes avaient subi le même parcours.
Aussi du même flegme et qui ne laissait pas de m’étonner, je suçais peu
après Jean, mon sous-directeur. Avec un air impérieux et après que nous
revenions de réunion il m’avait demandé de faire cela dans le parking de
la société. Je lui fis remarquer qu’on pouvait nous voir à cette heure
de sortie où nombres de collègues passaient. Il me dit mi-sérieux que
cela l’excitait. Je ne pus que baisser la tête pour qu’on ne vit qu’à
peine ma chevelure blonde dessus monsieur le sous-directeur. Je pouvais
espérer qu’on ne put identifier la salope qui suçait ce jour-là. Il me
somma d’avaler.
Je devins amante officiel du sous-directeur, le patron ayant jeté son
dévolu sur une autre. J’étais l’objet de pratiques insolites et
vicieuses. Notamment je devais enlever ma culotte avant que de le
rejoindre dans son bureau. Il me demandait à lui présenter des documents
tandis que sa main preste me relevait la jupe parcourant mes fesses et
me tripotant le sexe. Je devais rester impavide durant car les collègues
pouvaient nous voir à travers la cloison de verre. Je pris goût à ce
jeu. Je mouillais. Nous allions peu après aux toilettes finir.
Entre temps je dus admettre que mon mari était médiocre au pieu. Baiser
l’embêtait. Au contraire je prenais goût à la chose. Outre le bénéfice
matériel que j’en tirais, je n’y rechignais pas. Jouir et faire jouir
participait de ma joie et de mon équilibre. Je n’eus pas de même à
déplorer la réputation de salope dont on m’affublait. En effet pour peu
qu’on eût un mot flatteur ou agréable on obtenait à tout le moins à me
caresser voir que je suce hâtivement dans un coin. Je ne dédaignais pas
non plus le petit personnel. L’homme de ménage et le concierge furent de
mes amants.
Le plus sordide est que les ans passant je ne voulus jamais renoncer. Je
concevais que de plus jeunes et nouvelles pussent me supplanter. Je n’en
voulais pas moins dans la broîte demeurer une référence en matière de
coquinerie. Je jouais à cet égard l’entremetteuse. Tant les femmes que
les hommes venaient me voir pour nouer des intrigues. Je participais
même à quelques parties fines dont j’étais la grande prêtresse. Mes
tenues devenaient aussi ostensiblement sexy. Je n’avais cure de ce qu’en
pensait mon mari. D’autres que lui bandaient dessus.
Un jour cruellement je lui balançais que j’avais mon rang à tenir. Une
femme de quarante ans devait avoir un extérieur agréable. Il ne devait
se faire trop d’illusions. Hasardant une remarque , il dit que je
n’avais pas tant à me maquiller. Au naturel j’étais plus belle. Cet
imbécile eût voulu que je me résolve aux outrages du temps et que je
renonce à séduire. Je passais outre. Je n’avais cure qu’on insulta dans
mon dos me traitant de pute, de couguar ou de vieille peau. Mes anciens
amants me revenaient toujours assurés de passer un bon moment et d’avoir
les couilles vidées.
Je n’envisage pas l’avenir. Cependant je suis moins dans la lutte et la
compétition. J’ai autour de moi une cohorte d’happy few. Ils savent que
je suis de bon conseil. Que je n’ai pas mon pareil pour prodiguer une
furtive et agréable fellation aux heures de stress. Qui plus est les
mâles jeunes et novices savent trouver en moi la femme indulgente et
initiatrice. J’adoube ces futurs chevaliers. Nombre sont passés entre
mes bras. Curieusement j’ai appris à aimer les hommes dans leurs
faiblesses et dans leurs forces. Ce sont de grands enfants. Ils me
donnent le meilleur d’eux-mêmes.
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