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En auto stop

En auto stop



Yasmine, coquine beurette, devient la copine d’un jeune bourgeois de Lille. Il arrive à éveiller ses sens… mais pas plus. Comme elle est mordue, elle n’en fait pas un fromage. Mais voilà que chéri s’en va faire un stage à Marseille… et que Yasmine, que ça titille où vous pensez, décide, sur un coup de tête, de le rejoindre en stop ! Ma pauvre mignonne, qu’est-ce que tu vas en faire, des découvertes, chemin faisant… Les voyages forment les jeunesses, pas vrai ? Surtout quand ces jeunesses… ont de jolies fesses ! Sensuelle, Yasmine s’allume comme de l’amadou. Mais c’est ensuite que ça devient vraiment « intéressant »… Quand ça lui monte au cerveau… avant de redescendre ! Elle n’aurait jamais cru, Yasmine, qu’elle était aussi ravagée ! Accrochez-vous, les amis, c’est elle qui conduit maintenant…

Cela faisait un mois que je travaillais chez Fashionista lorsque j’ai fait la connaissance de Pierre. Nous étions le vingt octobre, je m’en souviens car c’était l’anniversaire de ma mère. Je ne lui avais pas encore trouvé de cadeau et j’espérais que nous fermerions à l’heure.

Lorsque à sept heure moins vingt, il est entré dans la boutique en compagnie d’une fille blonde à la mine arrogante, j’ai compris que c’était fichu. Typiquement, c’était la cliente emmerdante. Riche, gâtée, sans considération pour le petit personnel. Depuis un mois, j’en avais tant côtoyé que je pouvais les identifier au premier regard. Endossant mon amabilité professionnelle, j’ai suspendu dans la cabine les trois robes du soir qu’elle voulait essayer. A l’autre bout du magasin, Martine R., occupée avec une femme qui venait pour sa fille, m’a adressé en même temps qu’une moue désolée, un coup d’œil qui m’enjoignait de ne pas bâcler le travail.

— Qu’est-ce que tu en penses, Pierre ?

La blonde était sortie de la cabine. En la voyant si gracieusement moulée dans le fourreau de dentelle à col montant, j’ai eu l’espoir que la vente se ferait vite.

— Vous êtes superbe, ai-je dit en tirant sur le tissu qui plissait un peu à la taille. Cette robe est faite pour vous.

Nous étions toutes deux face au miroir. Mince, la peau diaphane et les cheveux couleur de chanvre, elle me dominait d’une bonne tête.

— Je ne crois pas avoir demandé votre avis ! a-t-elle prononcé avec un regard qui me ****tissait encore.

Mes joues se sont colorées. A l’arrière-plan, le dénommé Pierre m’adressait un sourire empreint de gêne. Grand et large d’épaules, c’était un brun aux yeux bleu de Prusse. Ses cheveux bouclaient autour d’un visage régulier et ouvert, je lui donnais vingt ans – comme à sa compagne.

« Il est sympa, ai-je pensé en tendant deux nouvelles robes à la mijaurée. Qu’est-ce qu’il fiche avec cette pétasse ? ». J’avais eu le tort de regarder ma montre.

— Vous êtes pressée ? Je serais désolée de vous importuner.

Tu parles ! Tout ce qu’elle voulait, c’était me faire gronder par la patronne. La colère a fait battre mon cœur, mais j’ai réussi à me dominer. D’une voix égale, j’ai répondu que j’étais à sa disposition.

— Dans ce cas, je vais passer l’ensemble qui se trouve dans la vitrine, sur la gauche.

Les trois-quarts de sept heures sonnaient à Notre-Dame de la Treille lorsqu’ils ont quitté la boutique sans rien emporter.

— Je suis navrée, a murmuré Martine en m’aidant à replacer la montagne de vêtements sur les cintres. C’est une des filles P., une famille de hauts magistrats. D’habitude elle dépense beaucoup, je ne pouvais pas me permettre de la contrarier.

J’ai haussé les épaules, souri, alors que je pensais : « Et moi alors, je suis de la merde ? ».

— Et lui, qui est-ce ?

— Oh ! Plus important encore. Les N.-G. sont une très ancienne famille de drapiers. C’est le fils cadet. Il fait des études de commerce.

Nous n’avions pas échangé trois mots, mais je n’ai pas été surprise, le mardi suivant, en voyant Pierre passer et repasser devant la boutique. Ayant mis la tête à la porte, j’ai constaté qu’il faisait à pas lents des allers-retours entre la rue des Chats-Bossus et la place des Patiniers et qu’il regardait sa montre.

La journée avait été calme. A sept heures moins le quart, Martine a levé le nez de sa caisse pour me dire que je pouvais m’en aller. Après m’être changée (les beaux vêtements ne m’étaient prêtés que pour le travail) je me suis enfoncée dans la nuit humide, l’air de rien, attentive cependant à l’écho des pas qui doublaient les miens sur le trottoir sonore. Au moment où je m’engageais dans la rue Basse, il m’a abordée.

— Bonsoir ! Euh… je voulais m’excuser pour samedi… euh… vous vous souvenez de moi ?

Nous avions fait halte sous un réverbère. Des gouttelettes brillaient dans ses cheveux, sur les épaules de son manteau de cuir. C’était vraiment un beau garçon. Assuré et confiant. Quelqu’un que la misère, la maladie et le malheur n’avaient jamais touché de leur aile. Rien à voir avec les garçons de ma cité – les seuls que je connaissais alors.

J’ai accepté qu’il m’offre un verre, sachant que j’allais me mettre en retard et que ma mère ne manquerait pas de s’inquiéter, mais il était trop craquant – refuser était impossible.

Au hasard, nous avons poussé la porte d’un petit bar d’habitués, séduit par la paix feutrée du lieu, sa tiédeur. Il n’y avait que quelques tables. Au comptoir, deux hommes bavardaient avec la patronne, une grosse femme qui a souri d’un air complice en nous servant. Sans doute nous prenait-elle pour les amoureux que nous n’étions pas encore ? Contente et gênée, j’ai baissé les yeux pour éviter le regard de Pierre. Nous n’avions pas marché très longtemps, mais une pluie fine, insinuante et froide, s’était mise à tomber. J’ai bu avec plaisir le thé qu’il me versait. Les mains serrées autour de ma tasse, j’ai répondu à ses questions, j’en ai posé à mon tour. Une heure plus tard, il me laissait à la station de tram, étourdie comme après dix tours de grande roue, excitée et convaincue que je venais de rencontrer l’amour.

Les aiguilles de la Swatch offerte par ma mère au Noël dernier indiquaient neuf heures et cinq minutes lorsqu’en secouant toutes ses ferrailles, le tram a pilé devant mon arrêt. J’avais encore un gros quart d’heure de marche pour arriver chez moi. « Merde ! », ai-je soupiré en accélérant l’allure.

Dans cet environnement hostile, l’anxiété, la peur et la culpabilité, émotions et sentiments qui avaient nourri mon enfance et me laissaient une paix relative durant mes heures de boulot, reprenaient le dessus. De loin, j’ai vu mon bloc brillant de toutes ses loupiotes. Telle que je la connaissais, ma mère avait dû ameuter les voisins. Comble de malchance, Rachid et deux de ses potes squattaient l’entrée en buvant des bières.

— Tu sais que ta mère te cherche partout ? a-t-il éructé. La pôv femme ! D’où que tu t’amènes maquillée comme une pute ?

Sans répondre, j’ai écarté son bras tendu, je me suis jetée dans l’escalier, mains sur les oreilles pour ne pas l’entendre crier : « T’es devenue une vraie pétasse depuis que tu bosses chez les bourges. Putain de ta race ! faudra quand même bien qu’on s’explique. »

Rachid avait vingt ans. Nous avions grandi sur le même palier. Quelques mois plus tôt, nous avions flirté puis fait l’amour dans une des nombreuses caves à l’abandon. C’est la curiosité, un désir engendré par ma propre sensualité plutôt qu’un attrait véritable qui m’avait jetée vers lui. En dépit d’une surveillance étroite et d’avertissements répétés, j’étais attirée par les hommes et je désirais faire l’amour.

Sans expérience du flirt, j’avais éprouvé une surprise vaguement dégoûtée la première fois que la langue de Rachid avait ouvert mes lèvres, mais assez vite, des sensations agréables s’étaient substituées à cet écœurement léger. Quand cette langue me fouillait comme un sexe miniature, mes cuisses s’écartaient, je ne pouvais empêcher mon bassin d’onduler à la rencontre de la verge qui durcissait sous le jean de mon partenaire.

J’aimais la v******e du désir qui le plaquait à moi. Ses grandes mains sèches s’emparaient de mes seins pour les rouler, les pétrir, et ces caresses sans douceur faisaient monter mon excitation. A notre deuxième rencontre, je l’ai laissé relever mon tee-shirt et dégrafer mon soutien-gorge. Fascinée, j’ai regardé sa bouche approcher, puis saisir une de mes pointes sombres. Récemment, mes seins avaient poussé. Les petites mandarines qui me désespéraient avaient cédé la place à des seins suffisamment ronds pour se trouver à l’étroit dans la soie synthétique et la dentelle rose d’un 85 C.

Tandis qu’il les ballottait dans ses mains, je retrouvais en plus intense le plaisir que j’éprouvais à les sentir denses, élastiques et fermes lorsque je les caressais en me lavant. Les violents suçons qu’il leur faisait subir, ses mordillements, m’emplissaient d’un trouble assez puissant pour que je me laisse allonger sans protester sur la pile de sacs à patates qui nous servaient de lit.

Couché sur moi, haletant, Rachid ne s’écartait que pour baisser la fermeture Eclair de mon jean. Ses doigts s’accrochaient à ma culotte, tiraient jusqu’à ce que ma petite touffe de poils frisés apparaisse dans l’ouverture du pantalon. Quand sa paume entrait en contact avec ma vulve, je saisissais son poignet et le repoussais fermement. Mes lèvres s’ouvraient sur une coulée chaude, mais je ne voulais pas céder encore. Dans un sursaut, je trouvais le courage de me lever. Renversant le garçon, je quittais la cave au galop.

Ce jeu risqué ne pouvait se prolonger indéfiniment. A notre troisième rendez-vous, il a prévenu mon geste. Un désir rageur décuplait ses forces. Les doigts qui serraient mon poignet avaient la dureté d’une pince, les jambes qui me maintenaient dans leur ciseau étaient aussi rigides que de l’acier.

Saisissant mon autre bras, il a maintenu mes deux mains au-dessus de ma tête. Quelque chose d’irrésistible s’était mis en mouvement. Le bric à brac entassé dans la cave avait disparu. Entre les murs souillés de crasse, il n’y avait plus que le souffle de son désir et du mien – un désir aussi fort que ma peur et qui m’ôtait toute envie de lutter. Lorsqu’il a collé son gland à l’entrée de mon vagin, j’ai renoncé à résister. Libérant mes poignets, il me demandait de le guider, et j’ai avancé une main timide, frémi au contact du bâton de chair brûlante. C’était la première fois que je touchais sa verge nue. La surprise et le plaisir m’ont fait gémir quand je l’ai sentie qui pénétrait mon ventre. Mais crispée dans l’attente d’une souffrance annoncée, je n’osais bouger les reins.

— Détends-toi ! a-t-il soufflé en commençant de courts va-et-vient.

Toute ma sensibilité réfugiée entre mes cuisses, je me suis écartée, brusquement avide d’être pénétrée à fond. Une voix inconnue résonnait dans le local obscur.

— Vas-y, haletait-elle, maintenant !

Rachid a frémi. D’un coup de reins, il a fini de s’enfoncer dans la chair humide de mon vagin. Une sensation sourde, désagréable, se répandait dans mon ventre. Ça n’avait rien à voir avec la douleur redoutée. C’était plutôt une gêne. L’impression que sa bite était devenue énorme et que je ne pourrai la tolérer longtemps.

Après quelques secondes durant lesquelles il a repris souffle et murmuré : « Ça va ? », il s’est mis à bouger en mouvements amples et lents, qui loin d’augmenter ma gêne, me faisaient du bien. Ce frottement excitant de son sexe contre les parois de mon vagin, ce n’était pas encore le plaisir, mais je sentais que je m’en approchais.

En cognant au fond de ma chatte, le gland suscitait une sensation nouvelle, à la fois profonde et ténue, lointaine comme une clarté entrevue au bout d’un très long tunnel. En soupirant, j’ai replié mes jambes pour le sentir mieux. Bien réelle à présent, la jouissance grandissait dans mon ventre. Déjà, je sentais comment je devais bouger pour en prendre une part active et je m’impatientais car cela venait trop lentement.

Rachid, lui, était près de l’orgasme. Je le devinais aux mouvements accélérés de son bassin. Il me pilonnait si fort que tout mouvement me devenait impossible. Il a éjaculé soudain avec un grognement de triomphe et de rage, et je suis restée stupide en sentant gicler le sperme chaud.

Redressé, il allumait une cigarette, jetait son allumette en prononçant : « C’est le kif, hein ? ». Machinalement, je me suis levée à mon tour, j’ai dit : « Fais gaffe à ne pas foutre le feu ! », déçue, sans savoir si c’était moi, lui, ou l’amour qui était en cause. Toute cette littérature à propos de la jouissance ! Si ça n’était que ça, je n’étais pas éblouie. Pourtant, à certain moment, un faisceau de sensations avait paru préparer un envol. « La prochaine fois peut-être, me suis-je dit en filant chez moi afin de me laver – mais pas avec Rachid ! »

Depuis, je le fuyais, refusant « de remettre ça » comme il m’en suppliait. A bout d’arguments, il m’avait menacée de tout dire à ma mère. Comme si le retard de règles qui avait suivi ne m’avait pas suffisamment angoissée ! Rétrospectivement, j’en frémissais encore. Quelle folie d’avoir baisé sans préservatif. Enceinte à dix-sept ans… c’était un coup à faire mourir maman !

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